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LXXIV. La dernière fois qu'on célébra le jour de sa naissance, il crut voir en songe un APOLLON TÉMénite d'une grandeur et d'une beauté rares, qu'il avait fait venir de Syracuse pour le placer dans la bibliothèque d'un temple nouvellement construit; et cet Apollon lui disait que certainement ce ne serait pas Tibère qui ferait sa dédicace. Quelques jours avant sa mort, un tremblement de terre fit tomber la tour du phare dans l'île de Caprée; et à Misène, des cendres chaudes qu'on avait apportées pour échauffer son appartement, s'étant refroidies et éteintes, se rallumèrent tout-àcoup sur le soir, et brûlèrent jusqu'au jour.

LXXV. A la première nouvelle de sa mort, la joie fut telle dans Rome, que chacun courait dans les criant qu'il fallait le jeter dans le Tibre, ou conjurant la terre et les dieux mânes de refuser une place à son ombre, si ce n'est parmi les impies et dans le Tartare d'autres menaçaient de le traîner aux Gémonies. Une atrocité récente se joignait au souvenir de ses anciennes barbaries. Le sénat avait statué que le supplice des citoyens condamnés serait toujours différé jusqu'au dixième jour : quelques malheureux devaient être exécutés précisément le jour où l'on apprit la mort de Tibère; ils demandaient leur grace à grands cris; mais comme il n'y avait personne à qui l'on pût s'adresser, Caius étant encore absent, les gardes, craignant de rien faire contre la règle, les étranglèrent (1), et exposèrent leurs cadavres. La haine redoubla contre le tyran dont la barbarie se

(1) Dion dit précisément le contraire, et assure qu'ils furent sauvés.

landum, Romam per milites deportatum est crematumque publico funere.

LXXVI. Testamentum duplex ante biennium fecerat, alterum suâ, alterum liberti manu, sed eodem exemplo; obsignaveratque etiam humillimorum signis. Eo testamento hæredes æquis partibus reliquit, Caium ex Germanico, et Tiberium ex Druso, nepotes; substituitque invicem. Dedit et legata plerisque, inter quos virginibus vestalibus, ac militibus universis, plebique romanæ viritim, atque etiam separatim vicorum magistris.

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faisait encore sentir après sa mort. Lorsqu'on transporta son corps de Misène, on criait qu'il fallait le brûler comme on pourrait dans l'amphithéâtre d'Atella mais des soldats le portèrent à Rome, et le brûlèrent avec les cérémonies ordinaires.

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LXXVI. Il avait fait son testament deux ans auparavant : il y en avait deux exemplaires, l'un de sa main, l'autre de celle d'un affranchi, mais tous deux parfaitement semblables et signés des derniers de ses esclaves. Il instituait ses petits-fils Caius et Tibère ses héritiers par moitié, et les substituait l'un à l'autre. Il faisait plusieurs legs aux vestales, aux soldats, à chaque citoyen, et aux principaux de chaque quartier.

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RÉFLEXIONS SUR TIBÈRE.

ON peut regarder Tibère comme une des ames les plus perverses qui aient jamais déshonoré la nature humaine. Il y a eu des tyrans qui ont commis de plus grands crimes : il n'y en a point d'aussi odieux, et dont les actions et les paroles soient aussi détestables. La plupart de ces despotes qui ont traité les hommes comme des jouets et des victimes, étaient des esprits faibles, étourdis de leur grandeur, corrompus par la flatterie, enivrés par le pouvoir; et c'est du moins une excuse. Tibère n'en peut avoir aucune : il avait la tête saine et robuste, accoutumée au travail et à l'application; il n'était dupe de personne. Parvenu à l'empire dans un âge mûr, il l'avait accepté avec précaution, et en jouissait sans ivresse ; il en connaissait les devoirs, et remplissait très-bien ceux qui tiennent à une administration sévère: souvent il portait une loi sage en commettant une action atroce, et parlait avec gravité et sagesse en agissant avec barbarie. Quel fut donc le principe de toutes ses cruautés ? Je vais tâcher de le développer.

Il était né dur et méchant, mais avec assez d'esprit pour ne l'être qu'autant qu'il le voudrait ou qu'il le faudrait. Naturellement taciturne et observateur, ses réflexions avaient pris la teinte de son ame; elles étaient sombres et noires. Il n'avait vu dans les hommes que ce qui apprend à les mépriser. Placé dans des conjonctures épineuses, en butte aux dangers et aux soupçons, un sentiment de haine s'était joint à ce mépris pour l'humanité qui se manifesta dans presque toutes les actions de sa vie. Forcé de dévorer des affronts et des chagrins, il s'était aigri dans le silence et dans la retraite ; en sorte que, lorqu'il monta sur le trône, il fut disposé à faire le mal par caractère et par vengeance, et à s'armer de tous ses vices, qui peut-être seraient restés oisifs dans son

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ame, si les circonstances et les contrariétés ne les avaient réveillés à-peu-près comme un reptile venimeux fuit volontiers l'aspect des hommes, mais, lorsqu'il est attaqué et tourmenté, s'irrite, se gonfle et combat avec ses poisons. Tibère, comme l'a remarqué Tacite, ne déploya que par degrés tout ce que son cœur renfermait de méchanceté. Elle se laissait voir de temps en temps, et annonçait tout ce qu'on en devait craindre; mais son activité, ses soins, ses lumières, une modération affectée, balançaient l'opinion des hommes: on voyait bien qu'il n'était pas possible de l'aimer; mais on ne savait pas à quel point on devait le haïr. Il se fit longtemps un jeu cruel d'exercer la bassesse et la patience du sénat, et de conduire les hommes qu'il gouvernait au degré d'avilissement dont il les croyait capables, ne fût-ce que pour justifier à ses propres yeux l'opinion qu'il en avait : peutêtre allèrent-ils jusqu'à la surpasser; et c'est ce qu'on peut dire de plus fort. Mais en les voyant aussi abjects, il songeait souvent qu'ils avaient flatté César et l'avaient assassiné; qu'ils avaient conspiré vingt fois contre Auguste; que la crainte seule les lui soumettait; que, dans le temps de la prospérité des petits-fils d'Auguste, ces mêmes hommes qui rampaient actuellement à ses pieds, ne l'appelaient que l'Exilé de Rhodes, et auraient conduit la main du jeune Caius pour signer son arrêt de mort. Toutes ces idées, roulant à tout moment dans cette ame farouche, lui inspiraient une rage muette et cachée et sur le moindre prétexte il sévissait contre ce sénat qui lui était toujours suspect, et contre ses propres flatteurs, et contre les ministres même de ses vengeances: car rien n'était assuré auprès d'un tyran politique qui jugeait la méchanceté qu'il avait à ses ordres, ordonnait le crime et le punissait, et sur-tout en savait trop pour épargner jamais ses complices. S'il laissa Séjan régner dans Rome, c'est que, fatigué de la bassesse dégoûtante des Romains, -et résolu de se retirer à Caprée, il lui fallait quelqu'un sur qui il pût se reposer des soins du gouvernement, et rejeter une

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