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pable d'opiniâtreté ou de mauvaise foi? Eh! qui êtesvous pour prononcer à cet égard, et pour condamner vos frères? Pénétrez-vous dans le fond de leur âme? ses replis sont-ils ouverts à vos yeux? partagez-vous avec l'Éternel l'attribut incommunicable de scrutateur des cœurs ? Quel sujet demande plus d'examen, de prudence et de modération, que celui que vous décidez avec tant de légéreté et d'assurance? Est-il donc si facile de marquer avec précision les bornes de la vérité; de distinguer avec justesse le point souvent invisible où elle finit, et où l'erreur commence; de déterminer ce que tout homme doit admettre et concevoir, ce qu'il ne peut rejeter sans crime? Qui peut connaître, encore une fois, la nature intime des esprits, et toutes les modifications dont ils sont susceptibles? Nous le voyons tous les jours, il n'est point de vérité si claire qui n'éprouve des contradictions; il n'est point de système auquel on ne puisse opposer des objections, souvent aussi fortes que les raisons qui les défendent. Ce qui est simple et évident pour l'un, paraît faux et incompréhensible à l'autre : ce qui ne vient pas seulement de leurs divers degrés de lumières, mais encore de la différence même des esprits; car on observe dans les plus grands génies la même variété d'opinions, et plus grande assurément entre eux que dans le vulgaire.

Mais, sans nous arrêter à ces généralités, entrons dans quelques détails ; et comme la vérité s'établit mieux quelquefois par son contraire que directement, si nous montrons en peu de mots l'inutilité, l'injustice et les suites funestes de l'intolérance, nous aurons prouvé la justice et la nécessité de la vertu qui lui est opposée.

De tous les moyens qu'on emploie pour arriver à quel

que but, la violence est assurément le plus inutile et le moins propre à remplir celui qu'on se propose : en effet, pour atteindre un but quel qu'il soit, il faut au moins s'assurer de la nature et de la convenance des moyens que T'on a choisis; rien n'est plus sensible; toute cause doit avoir en soi un rapport nécessaire avec l'effet qu'on en attend; en sorte qu'on puisse voir cet effet dans sa cause, et le succès dans les moyens; ainsi, pour agir sur des corps, pour les mouvoir, les diriger, on emploiera des forces physiques; mais pour agir sur des esprits, pour les fléchir, les déterminer, il en faudra d'un autre genre ; des raisonnemens, par exemple, des preuves, des motifs; ce n'est point avec des syllogismes que vous tenterez d'abattre un rempart, ou de ruiner une forteresse; et ce n'est point avec le fer et le feu que vous détruirez des erreurs, ou redresserez de faux jugemens. Quel est donc le but des persécuteurs? De convertir ceux qu'ils tourmentent; de changer leurs idées et leurs sentimens pour leur en inspirer de contraires; en un mot, de leur donner une autre conscience, un autre entendement. Mais quel rapport y a-t-il entre des tortures et des opinions? Ce qui me paraît clair, évident, me paraîtra-t-il faux dans les souffrances? Une proposition que je vois comme absurde et contradictoire, sera-t-elle claire pour moi sur un échafaud? Est-ce, encore une fois, avec le fer et le feu que la vérité perce et se communique? Des preuves, des raisonnemens peuvent me convaincre et me persuader; montrez-moi donc ainsi le faux de mes opinions, et j'y renoncerai naturellement et sans efforts; mais vos tourmens ne feront jamais ce que vos raisons n'ont pu

Pour rendre ce raisonnement plus sensible, qu'on nous permette d'introduire un de ces infortunés, qui, prêt à mourir pour la foi, parle ainsi à ses persécuteurs : Oh! mes frères, qu'exigez-vous de moi? comment puis-je vous satisfaire? Est-il en mon pouvoir de renoncer à mes seitimens, à mes opinions, pour m'affecter des vôtres ? de changer, de refondre l'entendement que Dieu m'a donné, de voir par d'autres yeux que les miens, et d'être un autre que moi? Quand ma bouche exprimerait cet aveu que vous désirez, dépendrait-il de moi que mon cœur fût d'accord avec elle, et ce parjure forcé de quel prix seraitil à vos yeux? Vous-mêmes, qui me persécutez, pourriezvous jamais vous résoudre à renier votre croyance? Ne feriez-vous pas aussi votre gloire de cette constance qui vous irrite et qui vous arme contre moi ? Pourquoi voulezvous donc me forcer, par une inconséquence barbare, à mentir contre moi-même, et à me rendre coupable d'une lâcheté qui vous ferait horreur?

Par quel étrange aveuglement renversez-vous pour moi seul toutes les lois divines et humaines? Vous tourmentez les autres coupables pour tirer d'eux la vérité, et vous me tourmentez pour m'arracher des mensonges; vous voulez que je vous dise ce que je ne suis pas, et vous ne voulez pas que je vous dise ce que je suis. Si la douleur me faisait nier les sentimens que je professe, vous approuveriez mon désaveu, quelque suspect qu'il vous dût être ; vous punissez ma sincérité, vous récompenseriez mon apostasie; vous me jugez indigne de vous, parce que je suis de bonne foi: n'est-ce donc qu'en cessant de l'être que je puis mériter ma grâce? Disciples d'un maître qui ne prêcha que la vérité, croyez-vous augmenter sa gloire,

en lui donnant pour adorateurs des hypocrites et des parjures? Si c'est le mensonge que j'embrasse et que je défends, il a pour moi toutes les apparences de la vérité; Dieu, qui connaît mon cœur, voit bien qu'il n'est point complice des égaremens de mon esprit, et que dans mes intentions, c'est la vérité que j'honore, même en combattant contre elle.

gereux,

Eh! quel autre intérêt, quel autre motif pourrait m'animer? Si je m'expose à tout souffrir, à perdre tout ce que j'ai de plus cher pour suivre des sentimens dont l'erreur m'est connue, je ne suis qu'un insensé, un furieux, plus digne de votre pitié que de votre haine; mais si je m'expose à tout souffrir, si je brave les tourmens et la mort pour conserver ce qui m'est plus précieux que la vie, les droits de ma conscience et de ma liberté, que voyez-vous dans ma persévérance qui mérite votre indignation? Mes sentimens, dites-vous, sont les plus danles plus condamnables; mais n'avez-vous que le fer et le feu pour m'en convaincre et me ramener? Quel étrange moyen de persuasion que des bûchers et des échafauds! La vérité même serait méconnue sous cet aspect; hélas! ce n'est point ainsi qu'elle exerce sur nous son empire, elle a des armes plus victorieuses; mais celles que vous employez ne prouvent que votre impuissance: s'il est vrai que mon sort vous touche, que vous déploriez mes erreurs, pourquoi précipiter pourquoi précipiter ma ruine, que j'aurais prévenue peut-être? pourquoi me ravir un tems que Dieu m'accorde pour m'éclairer? Prétendez-vous lui plaire en empiétant sur ses droits, en prévenant sa justice? et pensez-vous honorer un Dieu de paix et de charité, en lui offrant vos frères en holocauste, et en lui élevant des

trophées de leurs cadavres? » Telles seraient en substance les expressions que la douleur et le sentiment arracheraient à cet infortuné, si les flammes qui l'environnent lui permettaient d'achever.

Quoi qu'il en soit, plus on approfondit le système des intolérans, et plus on en sent la faiblesse et l'injustice: du moins auraient-ils un prétexte, si des hommages forcés, qu'à l'instant le cœur désavoue, pouvaient plaire au Créateur; mais si la seule intention fait le prix du sacrifice, et si le culte intérieur est surtout celui qu'il demande, de quel œil cet Être infini doit-il voir des téméraires qui osent attenter à ses droits, et profaner son plus bel ouvrage, en tyrannisant des cœurs dont il est jaloux? Il n'est aucun roi sur la terre qui daignât accepter un encens que la main seule offrirait, et l'on ne rougit pas d'exiger pour Dieu cet indigne encens; car enfin tels sont les succès si vantés des persécuteurs, de faire des hypocrites ou des martyrs, des lâches ou des héros; l'âme faible et pusillanime qui s'effarouche à l'aspect des tourmens, abjure en frémissant sa croyance, et déteste l'auteur de son crime; l'âme généreuse, au contraire, qui sait contempler d'un œil sec le supplice qu'on lui prépare, demeure ferme et inaltérable, regarde avec pitié les persécuteurs, et vole au trépas comme au triomphe ; l'expérience n'est que trop pour nous; quand le fanatisme a fait couler des flots de sang sur la terre, n'a-t on pas vu des martyrs sans nombre s'indigner et se roidir contre les obstacles? et à l'égard des conversions forcées, ne les viton pas aussitôt disparaître avec le péril, l'effet cesser avec la cause, et celui qui céda pour un tems, revoler vers les siens dès qu'il en eut le pouvoir; pleurer avec eux sa fai

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