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le frère avec la sœur. Or, il est difficile de rien imaginer de plus pernicieux dans la politique qu'un pareil ordre de succession: car tous les petits démêlés domestiques devenant des désordres dans l'état, celui des deux qui avoit le moindre chagrin, soulevoit d'abord contre l'autre le peuple d'Alexandrie; populace immense, toujours prête à se joindre au premier de ses rois qui vouloit l'agiter. De plus, les royaumes de Cyrène et de Chypre étant ordinairement entre les mains d'autres princes de cette maison, avec des droits réciproques sur le tout, il arrivoit qu'il y avoit presque toujours des princes régnans, et des prétendans à la couronne; que ces rois étoient sur un trône chancelant; et que, mal établis au-dedans, ils étoient sans pouvoir au-dehors.

Les forces des rois d'Egypte, comme celles des autres rois d'Asie, consistoient dans leurs auxiliaires grecs. Outre l'esprit de liberté, d'honneur et de gloire qui animoit les Grecs, ils s'occupoient sans cesse à toutes sortes d'exercices du corps : ils avoient, dans leurs principales villes, des jeux établis, où les vainqueurs obtenoient des couronnes aux yeux de toute la Grèce; ce qui donnoit une émulation générale. Or, dans un temps où l'on combattoit avec des armes dont le succès dépendoit de la force et de l'adresse de celui qui s'en servoit, on ne peut douter que des gens ainsi exercés n'eussent de grands avantages sur cette foule de barbares pris indiffé

remment, et menés sans choix à la guerre, comme les armées de Darius le firent bien voir.

Les Romains, pour priver les rois d'une telle milice, et leur ôter sans bruit leurs principales forces, firent deux choses: premiérement, ils établirent, peu à peu, comme une maxime chez les Grecs, qu'ils ne pourroient avoir aucune alliance, accorder du secours, ou faire la guerre à qui que ce fût, sans leur consentement : de plus, dans leurs traités avec les rois, ils leur défendirent de faire aucunes - levées chez les alliés des Romains; ce qui les réduisit à leurs troupes nationales (*).

CHAPITRE V I.

De la conduite que les Romains tinrent pour soumettre tous les peuples.

DANS le cours de tant de prospérités, où l'on se néglige pour l'ordinaire, le sénat agissoit toujours avec la même profondeur; et, pendant que les armées consternoient tout, il tenoit à terre ceux qu'il trouvoit abattus.

(*) Ils avoient déja eu cette politique avec les Carthaginois, qu'ils obligèrent, par le traité, à ne plus se servir de troupes auxiliaires, comme on le voit dans un fragment de Dion,

Il s'érigea en tribunal, qui jugea tous les peuples à la fin de chaque guerre, il décidoit des peines et des récompenses que chacun avoit méritées. Il ôtoit une partie du domaine du peuple vaincu, pour la donner aux alliés : en quoi il faisoit deux choses; il attachoit à Rome des rois dont elle avoit peu à craindre, et beaucoup à espérer; et il en affoiblissoit d'autres, dont elle n'avoit rien à espérer, et tout à craindre.

On se servoit des alliés pour faire la guerre à un ennemi; mais d'abord on détruisit les destructeurs. Philippe fut vaincu par le moyen des Etoliens, qui furent anéantis d'abord après, pour s'être joints à Antiochus. Antiochus fut vaincu par le secours des Rhodiens: mais, après qu'on leur eut donné des récompenses éclatantes, on les humilia pour jamais, sous prétexte qu'ils avoient demandé qu'on fît la paix avec Persée.

Quand ils avoient plusieurs ennemis sur les bras, ils accordoient une trève au plus foible, qui se croyoit heureux de l'obtenir, comptant pour beaucoup d'avoir différé sa ruine.

Lorsque l'on étoit occupé à une grande guerre, le sénat dissimuloit toutes sortes d'injures, et attendoit, dans le silence, que le temps de la punition fût venu: que si quelque peuple lui envoyoit les coupables, il refusoit de les punir, aimant mieux tenir toute la nation pour criminelle, et se réserver une vengeance utile.

Comme ils faisoient à leurs ennemis des maux inconcevables, il ne se formoit guère de ligue contre eux ; car celui qui étoit le plus éloigné du péril ne vouloit pas en approcher.

Par-là, ils recevoient rarement la guerre, mais la faisoient toujours dans le temps, de la manière, et avec ceux qu'il leur convenoit : et, de tant de peuples qu'ils attaquèrent, il y en a bien peu qui n'eussent souffert toutes sortes d'injures, si l'on avoit voulu les laisser en paix.

Leur coutume étant de parler toujours en maîtres, les ambassadeurs qu'ils envoyoient chez les peuples qui n'avoient point encore senti leur puissance, étoient sûrement maltraités : ce qui étoit un prétexte sûr pour faire une nouvelle guerre (*).

Comme ils ne faisoient jamais la paix de bonne-foi, et que, dans le dessein d'envahir tout, leurs traités n'étoient proprement que des suspensions de guerre, ils y mettoient des conditions qui commençoient toujours la ruine de l'état qui les acceptoit. Ils faisoient sortir les garnisons des places fortes, ou bornoient le nombre des troupes de terre, ou se faisoient livrer les chevaux ou les éléphans; et, si ce peuple étoit puissant sur la mer, ils l'obligeoient de brûler ses vaisseaux, et quelquefois d'aller habiter plus avant dans les terres.

Après avoir détruit les armées d'un prince,

(*) Un des exemples de cela, c'est leur guerre contre les Dalmates. Voyez Polybe.

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ils ruinoient ses finances, par des taxes excessives, ou un tribut, sous prétexte de lui faire payer les frais de la guerre : nouveau genre de tyrannie qui le forçoit d'opprimer ses sujets, et de perdre leur amour.

Lorsqu'ils accordoient la paix à quelque prince, ils prenoient quelqu'un de ses frères ou de ses enfans en otage; ce qui leur donnoit le moyen de roubler son royaume à leur fantaisie. Quand ils avoient le plus proche héritier, ils intimidoient le possesseur; s'ils n'avoient qu'un prince d'un degré éloigné, ils s'en servoient pour animer les révoltes des peuples.

Quand quelque prince ou quelque peuple s'étoit soustrait de l'obéissance de son souverain, ils lui accordoient d'abord le titre d'allié du peuple romain (1); et par-là ils le rendoient sacré et inviolable: de manière qu'il n'y avoit point de roi, quelque grand qu'il fût, qui pût un moment être sûr de ses sujets, ni même de sa famille.

Quoique le titre de leur allié fût une espèce de servitude, il étoit néanmoins trèsrecherché (2); car on étoit sûr que l'on ne recevoit d'injures que d'eux, et l'on avoit sujet d'espérer qu'elles seroient moindres : ainsi, il n'y avoit point de services que les

(1) Voyez sur-tout leur traité avec les Juifs, au premier livre des Machabées, ch. VIII.

(2) Ariarathe fit un sacrifice aux dieux, dit Polybe, pour les remercier de ce qu'il avoit obtenu cette alliance.

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