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frages, ou se les faire donner; les assemblées furent de véritables conjurations; on appella comices une troupe de quelques séditieux; l'autorité du peuple, ses loix, lui-même, devinrent des choses chimériques; et l'anarchie fut telle, qu'on ne put plus savoir si le peuple avoit fait une ordonnance, ou s'il ne l'avoit point faite (1).

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On n'entend parler, dans les auteurs, que des divisions qui perdirent Rome; mais on ne voit pas que ces divisions y étoient nécessaires, qu'elles y avoient toujours été, et qu'elles y devoient toujours être. Ce fut uniquement la grandeur de la république qui fit le mal, et qui changea en guerres civiles les tumultes populaires. Il falloit bien qu'il y eût à Rome des divisions; et ces guerriers si fiers, si audacieux, si terribles au-dehors, ne pouvoient pas être bien modérés au-dedans. Demander, dans un état libre, des gens hardis dans la guerre, et timides dans la paix, c'est vouloir des choses impossibles; et, pour règle générale, toutes les fois qu'on verra tout le monde tranquille dans un état qui se donne

(1) Voyez les lettres de Cicéron à Atticus, liv. IV, dettre XIII.

le nom de république, on peut être assuré que la liberté n'y est pas.

Ce qu'on appelle union dans un corps politique, est une chose très-équivoque : la vraie ́est une union d'harmonie, qui fait que toutes les parties, quelqu'opposées qu'elles nous paroissent, concourent au bien général de la société; comme des dissonances, dans la musique, concourent à l'accord total. Il peut y 'avoir de l'union dans un état où l'on ne croit voir que du trouble; c'est-à-dire, une harmonie d'où résulte le bonheur, qui seul est la vraie paix. Il en est comme des parties de cet univers, éternellement liées par l'action des unes, et la réaction des autres.

Mais, dans l'accord du despotisme asiatique, c'est-à-dire, de tout gouvernement qui n'est pas modéré, il y a toujours une division réelle. Le laboureur, l'homme de guerre, le négocianț, le magistrat, le noble, ne sont joints que parce que les uns oppriment les autres sans résistance; et, si l'on y voit de l'union, ce ne sont pas des citoyens qui sont unis; mais des corps morts ensévelis les uns auprès des

autres.

Il est vrai que les loix de Rome devinrent impuissantes pour gouverner la république;

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mais c'est une chose qu'on a vue toujours, que de bonnes loix, qui ont fait qu'une petite république devient grande, lui deviennent à charge lorsqu'elle s'est aggrandie; parce qu'elles étoient telles que leur effet naturel étoit de faire un grand peuple, et non pas de le gouverner.

Il y a bien de la différence entre les loix bonnes, et les loix convenables; celles qui font qu'un peuple se rend maître des autres, et celles qui maintiennent sa puissance lorsqu'il l'a acquise.

Ilya, à présent, dans le monde, une république que presque personne ne connoît (1), et qui, dans le secret et le silence, augmente ses forces chaque jour. Il est certain que, si elle parvient jamais à l'état de grandeur où sa sagesse la destine, elle changera nécessairement ses loix; ce ne sera point l'ouvrage d'un législateur, mais celui de la corruption même.

Rome étoit faite pour s'aggrandir, et ses loix étoient admirables pour cela. Aussi, dans quelque gouvernement qu'elle ait été, sous le pouvoir des rois, dans l'aristocratie, ou

(1) Le canton de Berne.

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dans l'état populaire, elle n'a jamais cessé de faire des entreprises qui demandoient de la conduite, et y a réussi. Elle ne s'est pas trouvée plus sage que tous les autres états de la terre en un jour, mais continuellement; elle a soutenu une petite, une médiocre, une grande fortune, avec la même supériorité; et n'a point eu de prospérités dont elle n'ait profité, ni de malheurs dont elle ne se soit servie.

Elle perdit sa liberté, parce qu'elle acheva trop tôt son ouvrage.

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CHAPITRE X.

De la corruption des Romains.

Je crois que la secte d'Epicure, qui s'introduisit à Rome sur la fin de la république, contribua beaucoup à gâter le cœur et l'esprit des Romains (1). Les Grecs en avoient été infatués avant eux; aussi avoient-ils été plutôt corrompus, Polybe nous dit que, de son temps,

(1) Cynéas en ayant discouru à la table de Pyrrhus, Fabricius souhaita que les ennemis de Rome pussent tous prendre les principes d'une pareille secte. Plutarque, vie de Pyrrhus, tome III, p. 404.

les sermens ne pouvoient donner de la confiance pour un Grec; au-lieu qu'un Romain en étoit pour ainsi dire, enchaîné (1).

Il y a un fait, dans les lettres de Cicéron à Atticus (2), qui nous montre combien les Romains avoient changé, à cet égard, depuis temps de Polybe.

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MEMMIUS, dit-il, vient de communiquer au sénat l'accord que son compétiteur et lui avoient fait avec les consuls, par lequel ceux-ci s'étoient engagés de les favoriser dans la poursuite du consulat pour l'année suivante; et eux, de leur côté, s'obligoient de payer aux consuls quatre cent mille sesterces, s'ils ne leur fournisoient trois augures qui déclareroient qu'ils étoient présens lorsque le peuple avoit fait la loi

(1)« Si vous prêtez aux Grecs un talent avec dix >> promesses, dix cautions, autant de témoins, il » est impossible qu'ils gardent leur foi; mais parmi » les Romains, soit qu'on doive rendre compte des » deniers publics, ou de ceux des particuliers, on » est fidèle, à cause du serment que l'on a fait. On » a donc sagement établi la crainte des enfers; et >> c'est sans raison qu'on la combat aujourd'hui » Polybe, livre VI.

(2) Liv. IV, lettre XVIII.

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