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rera point quelque utilité de l'emploi qu'on fera de l'argent qu'on lui demande : mais, quand on lui fait un affront, il ne sent que son malheur, et il y ajoute l'idée de tous les maux qui sont possibles.

Il est pourtant vrai que la mort de Lucrèce ne fut que l'occasion de la révolution qui arriva car un peuple fier, entreprenant, hardi, et renfermé dans des murailles, doit nécessairement secouer le joug, ou adoucir ses mœurs.

Il devoit arriver de deux choses l'une, ou que Rome changeroit son gouvernement, ou qu'elle resteroit une petite et pauvre monarchie.

L'histoire moderne nous fournit un exemple de ce qui arriva pour lors à Rome; et ceci est bien remarquable car, comme les hommes ont eu dans tous les temps les mêmes passions, les occasions qui produisent les grands changements sont différentes, mais les causes sont toujours les mêmes.

Comme Henri VII, roi d'Angleterre, augmenta le pouvoir des communes pour avilir les grands, Servius Tullius, avant lui, avoit étendu les priviléges du peuple pour abaisser le sénat (1). Mais le peuple, devenu d'abord plus hardi, renversa l'une et l'autre monarchie.

Le portrait de Tarquin n'a point été flatté; son nom n'a échappé à aucun des orateurs qui ont eu à parler contre la tyrannie: mais sa conduite avant son malheur, que l'on voit qu'il prévoyoit ; sa dou

(1) Voyez Zonare, et Denys d'Halicarnasse, Liv. IV.

ceur pour les peuples vaincus; sa libéralité envers les soldats; cet art qu'il eut d'intéresser tant de gens à sa conservation; ses ouvrages publics; son courage à la guerre; sa constance dans son malheur; une guerre de vingt ans, qu'il fit ou qu'il fit faire au peuple romain, sans royaume et sans biens; ses continuelles ressources, font bien voir que ce n'étoit pas un homme méprisable.

Les places que la postérité donne sont sujettes, comme les autres, aux caprices de la fortune. Malheur à la réputation de tout prince qui est opprimé par un parti qui devient le dominant, ou qui a tenté de détruire un préjugé qui lui survit!

Rome, ayant chassé les rois, établit des consuls annuels; c'est encore ce qui la porta à ce haut degré de puissance. Les princes ont dans leur vie des périodes d'ambition; après quoi, d'autres passions, et l'oisiveté même, succèdent: mais la république ayant des chefs qui changeoient tous les ans, et qui cherchoient à signaler leur magistrature pour en ▾ obtenir de nouvelles, il n'y avoit pas un moment de perdu pour l'ambition; ils engageoient le sénat à proposer au peuple la guerre, et lui montroient tous les jours de nouveaux ennemis.

Ce corps y étoit déjà assez porté de lui-même ; car, étant fatigué sans cesse par les plaintes et les demandes du peuple, il cherchoit à le distraire de ses inquiétudes, et à l'occuper au dehors. (1)

(1) D'ailleurs l'autorité du sénat étoit moins bornée dans les affaires du dehors que dans celles de la ville.

Or, la guerre étoit presque toujours agréable au peuple, parce que, par la sage distribution du butin, on avoit trouvé le moyen de la lui rendre utile.

Rome étant une ville sans commerce, et presque sans arts, le pillage étoit le seul moyen que les particuliers eussent pour s'enrichir.

On avoit donc mis de la discipline dans la manière de piller, et on y observoit à peu près le même ordre qui se pratique aujourd'hui chez les petits

Tartares.

Le butin étoit mis en commun (1), et on le distribuoit aux soldats: rien n'étoit perdu, parce que, avant de partir, chacun avoit juré qu'il ne détourneroit rien à son profit. Or, les Romains étoient le peuple du monde le plus religieux sur le serment, qui fut toujours le nerf de leur discipline militaire.

Enfin les citoyens qui restoient dans la ville jouissoient aussi des fruits de la victoire. On confisquoit une partie des terres du peuple vaincu, dont on faisoit deux parts: l'une se vendoit au profit du public; l'autre étoit distribuée aux pauvres citoyens, sous la charge d'une rente en faveur de la république.

Les consuls, ne pouvant obtenir l'honneur du triomphe que par une conquête ou une victoire, faisoient la guerre avec une impétuosité extrême : on alloit droit à l'ennemi, et la force décidoit d'abord.

(1) Voyez Polybe, Livre X, Chapitre XVI.

Rome étoit donc dans une guerre éternelle et toujours violente or, une nation toujours en guerre, et par principe de gouvernement, devoit nécessairement périr, ou venir à bout de toutes les autres, qui, tantôt en guerre, tantôt en paix, n'étoient jamais si propres à attaquer, ni si préparées à se défendre.

Par là les Romains acquirent une profonde connoissance de l'art militaire. Dans les guerres passageres, la plupart des exemples sont perdus; la paix donne d'autres idées, et on oublie ses fautes, et ses vertus même.

Une autre suite du principe de la guerre continuelle fut que les Romains ne firent jamais la paix que vainqueurs : en effet, à quoi bon faire une paix honteuse avec un peuple pour en aller attaquer un

autre ?

:

Dans cette idée, ils augmentoient toujours leurs prétentions à mesure de leurs défaites par là ils consternoient les vainqueurs, et s'imposoient à euxmêmes une plus grande nécessité de vaincre.

Toujours exposés aux plus affreuses vengeances, la constance et la valeur leur devinrent nécessaires; et ces vertus ne purent être distinguées chez eux de l'amour de soi-même, de sa famille, de sa patrie, et de tout ce qu'il y a de plus cher parmi les hommes. Les peuples d'Italie n'avoient aucun usage des machines propres à faire les siéges (1); et, de plus,

(1) Denys d'Halicarnasse le dit formellement, Livre Ix;

les soldats n'ayant point de paye, on ne pouvoit pas les retenir long-temps devant une place: ainst peu de leurs guerres étoient décisives. On se battoit pour avoir le pillage du camp ennemi ou de ses terres; après quoi le vainqueur et le vaincu se retiroient chacun dans sa ville. C'est ce qui fit la résistance des peuples d'Italie, et en même temps l'opiniâtreté des Romains à les subjuguer; c'est ce qui donna à ceux-ci des victoires qui ne les corrompirent point, et qui leur laissèrent toute leur pauvreté.

S'ils avoient rapidement conquis toutes les villes voisines, ils se seroient trouvés dans la décadence à l'arrivée de Pyrrhus, des Gaulois et d'Annibal; et, par la destinée de presque tous les états du monde, ils auroient passé trop vite de la pauvreté aux richesses, et des richesses à la corruption.

Mais Rome faisant toujours des efforts, et trouvant toujours des obstacles, faisoit sentir sa puissance sans pouvoir l'étendre, et, dans une circonférence trèspetite, elle s'exerçoit à des vertus qui devoient être si fatales à l'univers.

Tous les peuples d'Italie n'étoient pas également belliqueux les Toscans étoient amollis : par leurs richesses et par leur luxe; les Tarentins, les Ca

et cela paroît par l'histoire. Ils ne savoient point faire de galeries pour se mettre à couvert des assiégés. Ils tâchoient de prendre les villes par escalade. Éphorus a écrit qu'Artémon, ingénieur, inventa les grosses machines pour battre les plus fortes murailles. Périclès s'en servit le premier au siége de Samos, dit Plutarque, Vie de Périclès.

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