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camp, qui est, selon leur mode, pleine de magnificence, et chargée de tout plein d'action, et résigna cet honneur à son frère; mais ce fut aussi le seul office de capitaine qu'il résigna; tous les autres nécessaires et utiles il les fit très-laborieusement et exactement, tenant son corps couché, mais son entendement et son courage debout et ferme jusques au dernier soupir. Il pouvait miner ses ennemis, indiscrètement avancés en ses terres; et lui poisa merveilleusement qu'à faute d'un peu de vie, et pour n'avoir qui substituer à la conduite de cette guerre et aux affaires d'un état troublé, il eut à chercher la victoire sanglante et hazardeuse, en ayant une autre pure et nette entre ses mains; toutefois il ménagea miraculeusement la durée de sa maladie, à faire consumer son ennemi, et l'attirer loin de l'armée de mer et des places maritimes qu'il avait en la côte d'Afrique, jusques au dernier jour de sa vie, lequel par dessein il employa et réserva à cette grande journée. Il dressa sa bataille en rond, assiégeant de toutes parts l'ost des Portugais; lequel rond venant à courber et serrer, les empêcha non seulement au conflit (qui fut très-âpre par la valeur de ce jeune prince assaillant), vu qu'ils avaient à montrer visage à tout sens, mais aussi les empêcha à la fuite après leur route, et trouvants toutes les issues saisies et closes, ils furent contraints de se rejeter à eux-mêmes, "coacervanturque non solum cæde, sed etiam fugâ," et s'amonceler les uns sur les autres, fournissants aux vainqueurs une très-meurtrière victoire et très-entière. Mourant, il se fit porter et tracasser où le besoin l'appelait, et, coulant le long des files, exhortait ses capitaines et soldats, les uns après les autres; mais un coin de sa bataille se laissant enfoncer, on ne le put tenir qu'il ne montât à cheval l'épée au poing; il s'efforçait pour s'aller mêler, ses gens l'arrêtant, qui par la bride, qui par sa robe, et par ses étriers. Cet effort acheva d'accabler ce peu de vie qui lui restait; on le recoucha. Lui, se ressuscitant comme en sursaut de cette pâmoison, toute autre faculté lui défaillant, pour avertir qu'on tût sa mort, qui était le plus nécessaire commandement qu'il eût lors à faire, afin de n'engendrer quelque désespoir aux siens par cette nouvelle, expira, tenant le doigt contre sa bouche close, signe ordinaire de faire silence. Qui vécut oncques si long temps, et si avant en la mort? qui mourut oncques si debout? Montaigne.

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FRENCH READER.

42. Etudes philosophiques sur Catherine de Médecis.

Il existait un homme à qui Catherine tenait plus qu'à ses enfants; cet homme était Cosme Ruggieri. Elle le logeait à son hôtel de Soissons; elle avait fait de lui son conseiller suprême, chargé de lui dire si les astres ratifiaient les avis et le bons sens de ses conseillers ordinaires. De curieux antécédents justifiaient l'empire que Ruggieri conserva sur sa maîtresse jusqu'au dernier moment. Un des plus savants hommes du seizième siècle fut certes le médecin de Laurent de Médicis, duc d'Urbin, père de Catherine. Ce médecin fut appelé Ruggiero le Vieux (vecchio Ruggier et Roger l'ancien chez les auteurs français qui se sont occupés d'alchimie) pour le distinguer de ses deux fils, de Laurent Ruggiero, nommé le Grand par les auteurs cabalistiques; et de Cosme Ruggiero, l'astrologue de Catherine, également nommé Roger par plusieurs historiens français. Ruggiero le Vieux donc était si considéré dans la maison de Médicis, que les deux ducs Cosme et Laurent furent les parrains de ses deux enfants. Il dressa, de concert avec le fameux mathématicien Bazile, le thème de nativité de Catherine, en sa qualité de mathématicien, d'astrologue et de médecin de la maison de Médicis, trois qualités qui se confondaient souvent. A cette époque les sciences occultes se cultivaient avec une ardeur qui peut surprendre les esprits incrédules de notre siècle. si souverainement analyste. L'universelle protection accordée à ces sciences par les souverains de ce temps était d'ailleurs justifiée par les admirables créations des inventeurs qui partaient de la recherche du grand œuvre pour arriver à des résultats étonnants. Aussi jamais les souverains ne furent-ils plus avides de ces mystères. Les Fugger, en qui les Lucullus modernes reconnaîtront leurs maîtres, en qui les banquiers reconnaîtront leurs princes, étaient certes des calculateurs difficiles à surprendre; eh! bien, ces hommes si positifs qui prêtaient les capitaux de l'Europe aux souverains du seizième siècle endettés aussi bien que ceux d'aujourd'hui, ces illustres hôtes de CharlesQuint, commanditèrent les fourneaux de Paracelse. Au commencement du seizième siècle Ruggiero le Vieux fut le chef de cette université secrète d'où sortirent les Cardan, les Nostradamus, et les Agrippa, qui tour à tour furent médecins des

Valoîs; enfin tous les astronomes, les astrologues, les alchimistes qui entourèrent à cette époque les princes de la chrétienté, et qui furent plus particulièrement accueillis et protégés en France par Catherine de Médicis. Dans le thème de nativité que dressèrent Bazile et Ruggieri le Vieux, les principaux événements de la vie de Catherine furent prédits avec une exactitude désespérante pour ceux qui nient les sciences occultes. Cet horescope annoncait les malheurs qui pendant le siége de Florence signalèrent le commencement de sa vie, son mariage avec un fils de France, l'avénement inespéré de ce fils au trône, la naissance de ses enfants, et leur nombre. Trois de ses fils devaient être rois, chacun à leur tour, deux filles devaient être reines, et tous devaient mourir sans postérité. Ce thème se réalisa si bien, que beaucoup d'historiens l'ont cru fait après coup.

Chacun sait que Nostradamus produisit, au château de Chaumont, où Catherine alla lors de la conspiration de la Renaudie, une femme qui possédait le don de lire dans l'avenir. Or, sous le règne de François II., quand la reine voyait ses quatre fils en bas âge et bien portants, avant le mariage d'Elisabeth de Valois avec Philippe II. roi d'Espagne, avant celui de Marguerite de Valois avec Henri de Bourbon roi de Navarre, Nostradamus et son amie confirmèrent les circonstances du fameux thème. Cette personne, douée sans doute de seconde vue, et qui appartenait à la grande école des infatigables chercheurs du grand œuvre, mais dont la vie secrète a échappé à l'histoire, affirma que le dernier enfant couronné mourrait assassiné. Après avoir placé la reine devant un miroir magique où se réfléchissait un rouet, sur une des pointes duquel se dessina la figure de chaque enfant, la sorcière imprimait un mouvement au rouet, et la reine comptait le nombre des tours qu'il faisait. Chaque tour était pour chaque enfant une année de règne. Henri IV. mis sur le rouet fit vingt-deux tours. Cette femme dit à la reine effrayée que Henri de Bourbon serait en effet roi de France et régnerait tout ce temps. La reine Catherine voua dès lors au Béarnais une haine mortelle en apprenant qu'il succéderait au dernier des Valois assassiné. Curieuse de connaître quel serait le genre de sa mort à elle, il lui fut dit de se défier de Saint-Germain. Dès ce jour, pensant qu'elle serait renfermée ou violentée au château de Saint-Germain, elle n'y mit jamais le pied, quoique ce château fut infiniment plus convenable à ses

desseins par sa proximité de Paris, que tous ceux où elle alla se réfugier avec le roi durant les troubles. Quand elle tomba malade quelques jours après l'assassinat du duc de Guise aux états de Blois, elle demanda le nom du prélat qui vint l'assister. On lui dit qu'il se nommait Saint-Germain. "Je suis morte!" s'écria-t-elle. Elle mourut le lendemain, ayant d'ailleurs accompli le nombre d'années que lui accordaient tous ses horoscopes.

Ce fut pour Cosme Ruggieri, son mathématicien, son astronome, son astrologue, son sorcier si l'on veut, que Catherine fit lever la colonne adossée à la Halle-au-Blé, seul débris qui reste de l'hôtel de Soissons. Cosme Ruggieri possédait, comme les confesseurs, une mystérieuse influence, de laquelle il se contentait comme eux. Il nourrissait d'ailleurs une ambitieuse pensée supérieure à l'ambition vulgaire. Cet homme, que les romanciers dépeignent comme un bateleur, possédait la riche abbaye de Sainte-Mahé, en Basse-Bretagne, et avait refusé de hautes dignités ecclésiastiques; l'or que les passions superstitieuses de cette époque lui apportaient abondamment suffisait à sa secrète entreprise, et la main de la reine, étendue sur sa tête, en préservait le moindre cheveu de tout mal.

Charles IX. se distinguait alors, plus qu'en aucune époque de sa vie, par une majesté sombre qui ne messied pas aux rois. La grandeur de ses pensées secrètes se réflétait sur son visage, remarquable par le teint italien qu'il tenait de sa mère. Cette pâleur d'ivoire, si belle aux lumières, si favorable à l'expression de la mélancolie, faisait rigoureusement ressortir le feu de ses yeux d'un bleu noir, qui, pressés entre des paupières grasses, acquéraient ainsi la finesse acérée que l'imagination exige du regard des rois, et dont la couleur favorisait la dissimulation. Les yeux de Charles IX. étaient surtout terribles par la disposition de ses sourcils élevés, en harmonie avec un front découvert, et qu'il pouvait hausser et baisser à son gré. Il avait un nez large et long, gros du bout, un véritable nez de lion; de grandes oreilles, des cheveux d'un blond ardent, une bouche quasisaignante comme celle des poitrinaires, dont la lèvre supérieure était mince, ironique, et l'inférieure assez forte, pour faire supposer les plus belles qualités de cœur. Les rides imprimées sur ce front, dont la jeunesse avait été détruite par d'effroyables soucis, inspiraient un violent intérêt; les remords causés par l'inutilité de la Saint-Barthélemy, mesure qui lui fut astucieuse

ment arrachée, en avait causé plus d'une; mais il y en avait deux autres dans son visage qui eussent été bien éloquentes pour un savant à qui un génie spécial aurait permis de deviner les éléments de la physiologie moderne. Ces deux rides produisaient un vigoureux sillon allant de chaque pommette à chaque coin de la bouche, et accusaient les efforts intérieurs d'une organisation fatiguée de fournir aux travaux de la pensée et aux violents plaisirs du corps.

Si Catherine avait su l'effet de ses intrigues sur son fils, peut-être aurait-elle reculé ? Quel affreux spectacle! Ce roi si vigoureux était devenu débile, cet esprit si fortement trempé se trouvait plein de doutes; cet homme, en qui résidait l'autorité, se sentait sans appui; ce caractère ferme avait peu de confiance en lui-même. La valeur guerrière s'était changée par degrés en férocité, la discrétion en dissimulation. Ce grand homme méconnu, perverti, usé sur les mille faces de sa belle âme, roi sans pouvoir, ayant un noble cœur et n'ayant pas un ami, tiraillé par mille desseins contraires, offrait la triste image d'un homme de vingt-quatre ans désabusé de tout, se défiant de tout, décidé à tout jouer, même sa vie. Depuis peu de temps il avait compris sa mission, son pouvoir, ses ressources, et les obstacles que sa mère apportait à la pacification du royaume; mais cette lumière brillait dans une lanterne brisée. De Balzac : "Catherine de Médicis."

43. De l'Esprit Chagrin.

L'esprit chagrin fait que l'on n'est jamais content de personne, et que l'on fait aux autres mille plaintes sans fondement. Si quelqu'un fait un festin, et qu'il se souvienne d'envoyer un plat à un homme de cette humeur, il ne reçoit de lui pour tout remercîment que le reproche d'avoir été oublié. "Je n'étais pas digne," dit cet esprit querelleur, "de boire de son vin, ni de manger à sa table." Tout lui est suspect jusques aux caresses que lui fait sa maîtresse. "Je doute fort," lui dit-il, “que vous soyez sincère, et que toutes ces démonstrations d'amitié partent du cœur." Après une grande sécheresse, venant à pleuvoir, comme il ne peut se plaindre de la pluie, il s'en prend au ciel de ce qu'elle n'a pas commencé plus tôt. Si le hasard lui fait voir une bourse dans son chemin, il s'incline: "Il y a des gens," ajoute

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