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En la montrant dans tout son jour,
Elle sait l'embellir des roses de l'amour.
Eh! quel autre aurait le courage
D'en offrir seulement l'image?
Est-ce un courtisan toujours faux,
Qui ne trouve son avantage

Qu'à vous tromper, qu'à flatter vos défauts?
Une compagne qui vous aime,
A vous rendre parfait fait consister le sien.
Les vertus d'un époux deviennent notre bien,
Et sa gloire est la nôtre même.

Il y a quelques négligences, quelque langueur dans l'expression; mais les idées sont justes et belles.

Les accessoires de cette pièce lui donnaient autrefois un air de volupté et de fête : elle a perdu toute sa fraîcheur sur un théâtre pour lequel elle ne fut jamais faite : d'ailleurs les temps, le goût, les mœurs, tout est changé: les femmes sont, en grande partie, déchues de leur empire: la galanterie est en pleine décadence; cette délicatesse, ces petits riens délicieux dans le comrnerce des femmes, qu'on appelait autrefois sentiment, ressemblent chaque jour davantage à la niaiserie; on n'y cherche pas aujourd'hui tant de finesse; on n'y fait point tant de façons; on se rapproche de la nature : nous devons trouver dans la pièce de Favart un peu de fadeur, car c'est une pièce essentiellement galante; c'est le triomphe des femmes ; c'est le triomphe de la politesse sur la barbarie.

Rien n'est plus théâtral que l'opposition de nos mœurs à celle des Turcs; mais cette opposition a été beaucoup plus marquée dans la révolution, par les grands rapports qu'elle nous a donnés avec la Porte ottomane : les Turcs sont aujourd'hui en Europe un monument de ce que nous étions nous-mêmes il y a douze cents ans : leur faiblesse actuelle rend témoignage à l'influence des arts, de l'industrie et du commerce sur la richesse et la puissance des

nations: cependant ils existent, ils vivent en paix, sauf quelques insurrections partielles, toujours fort exagérées dans les journaux : leur existence est appuyée sur les intérêts de peuples plus puissans qu'eux; c'est une excellente base: ils ont moins de désirs et de passions que nous ; ils dédaignent ce qui est l'objet de notre enthousiasme, de nos travaux, de nos combats; nous les méprisons, ils nous le rendent ; ils nous font hausser les épaules, nous leur faisons pitié : avec nos arts, notre philosophie et nos mœurs, il est évident qu'ils sauraient mieux naviguer et mieux se battre ; qu'ils seraient plus redoutables sur terre et sur mer : seraient-ils chez eux plus heureux et plus sages? C'est encore un problème, dont l'Institut proposera la solution au premier jour. (12 floréal an 11.)

1

DIDEROT.

LE PÈRE DE FAMILLE.

Ce drame est bien lugubre; il ne convenait guère à une fête; mais le peuple aime le pathétique, les déclamations et l'emphase. Le Père de Famille est à peu près la seule chose qui soit restée de l'énorme fatras de Diderot. Grâce à l'époque où cet homme se produisit dans la république des lettres, il fit plus de bruit par son délire que beaucoup d'auteurs n'en ont fait par leur esprit et par leur bon sens. On doute aujourd'hui si Diderot, considéré comme écrivain, fut charlatan ou fou; si son galimatias fut naturel ou calculé : de quelque manière qu'on décide la question, sa folie réelle ou feinte fut mieux accueillie que n'aurait pu l'être la plus profonde sagesse.

Le monde était gros des événemens qui ont rendu la fin du siècle si mémorable; le vertige et l'erreur planaient sur la nation; le désir des nouveautés, le goût pour les charlatans, le mépris pour l'antiquité et pour l'expérience, le fanatisme de la nature et de l'indépendance, la satiété du beau et du bon, la mollesse, la niaiserie, la langueur, fruits d'un luxe extravagant et d'une longue prospérité, formaient alors le caractère de ce qu'on appelait la bonne compagnie les esprits dépravés se repaissaient de chimères, n'enfantaient que des monstres; une vaste conspiration se tramait contre les deux bases de la société, contre l'institution qui

maintient l'ordre civil, et contre celle qui régit les consciences : la considération, la fortune, s'attachaient aux déclamateurs les plus audacieux, les plus ardens à flétrir cette double autorité. S'il y avait eu quelque chose de sacré dans le temps où Diderot parut, Diderot n'eût excité que la pitié ou le rire, ou plutôt il se fût bien gardé de jouer un rôle qui n'offrait que des dangers sans honneur ni profit : mais heureusement pour lui, il se trouva dans un pays où l'on avait une grande vénération pour les fous; on le prit pour un missionnaire, pour l'apôtre d'un nouveau testament; on admira son courage, son enthousiasme; et son cynisme fut regardé comme le dernier effort d'une philosophie qui brave les préjugés et s'affranchit des formes. Les autres zélateurs du nouvel évangile étaient encore prudens et timides; ils craignaient de se compromettre; ils ne catéchisaient qu'en secret; ils enveloppaient leur doctrine d'hieroglyphes mystérieux, connus des seuls adeptes. Diderot lui seul levant la tête, déchirant tous les voiles, prêchant à haute voix et criant de toutes ses forces, se signala par son héroïque intrépidité : on eût dit que son zèle effréné appelait la palme du martyre; mais on ne le jugea pas digne de cet honneur; quelques mois d'une détention fort douce furent la seule persécution dont on daigna l'honorer dans le cours d'une longue vie remplie des plus grands excès de liberté et d'audace: bien entendu l'indolence et la faiblesse du gouvernement n'empêchèrent point Diderot et ses confrères de crier au despotisme, à la tyrannie, à l'intolérance, à la superstition et au fanatisme. Ils ne se doutaient pas qu'en criant ainsi, ils prouvaient eux-mêmes la fausseté de leurs accusations; car s'il y avait eu tyrannie, ils n'auraient pas crié.

que

L'Académie applaudissait aux travaux apostoliques de Diderot, mais n'osait les récompenser : elle admirait le dévouement de ce héros, et gémissait en même temps d'être obligée de le repousser de son sein. Diderot ne fut point de l'Académie, mais il eut plus de célébrité que la plupart des académiciens; le plus grand saint de la secte ne put entrer dans le paradis ; mais on savait qu'il n'en était exclus que par l'excès de son courage et de son zèle : ces motifs d'exclusion lui faisaient plus d'honneur que son admission n'aurait pu lui en faire.

Si Diderot ne fut pas académicien, il fut le chef de l'Encyclopédie : c'est sa main hardie et infatigable qui éleva ce fanal fait pour éclairer l'univers, ce boulevard de la nouvelle doctrine, cette forteresse destinée pour tenir en respect les préjugés et les erreurs. Un si bean monument n'a pas rempli sa destinée : une terrible catastrophe, que le grand prophète Diderot était bien éloigné de prévoir, a donné aux esprits une autre direction. Le fanal de l'Encyclopédie n'éclaire plus guère, mais il fume beaucoup ce fameux boulevard est presque détruit, cette forteresse tombe en ruines; et, de ce grand ouvrage, il ne reste rien à Diderot que la gloire de l'avoir entrepris; car il y a toujours une sorte de grandeur dans ce projet de conquérir et de subjuguer les esprits de nouveaux principes et de nouvelles idées.

par

Dans ce temps-là, les puissances du Nord avaient les yeux sur la France, et leur attention se portait particulièrement sur cette portion de gens de lettres dont les écrits menaçaient l'Europe d'une révolution prochaine. Le roi de Prusse et l'impératrice de Russie entretinrent surtout une liaison fort intime avec les chefs de la secte. Frédéric trouva, dans Voltaire, un homme qui flattait singulièrement sa passion pour les vers, et son aversion

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