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d'Escarbagnas; cependant ces deux rôles appartenaient autrefois à l'actrice chargée des caractères et des duègnes. Lorsque Melle. Contat, dépourvue des qualités physiques nécessaires à l'emploi des coquettes, chercha des rôles plus assortis à son âge et à sa taille, celui de la marquise, dans le Philosophe sans le savoir, fut un de ceux qu'elle adopta. Ce que Melle. Contat n'avait fait que par convenance, on prétend aujourd'hui que Melle. Leverd le fasse par devoir; je crois, si on l'osait, qu'on lui ferait jouer la gouvernante et la tante de la Mère jalouse: on aime à lui faire jouer des rôles de vieilles, parce qu'elle est jeune ; c'est autant de gagné pour les actrices qui, n'étant plus jeunes, redoutent surtout les rôles de vieille. Melle, Leverd, dans ces rôles, trop vieux pour elle, se montre grande comédienne, et déploie un rare talent ; on admire dans son débit et dans son jeu cette fermeté, cette énergie, ce mordant, qui font si bien ressortir tous les traits du dialogue : de pareils rôles ne la vieillissent pas; elle les rajeunit. Après avoir joué madame Evrard, la femme jalouse, la marquise, etc., elle n'en est que plus vive et plus brillante encore dans les jeunes coquettes, dans la Célimène du misantrope, le premier et le plus difficile de tous les rôles de coquettes, et qui a valu à Melle. Leverd un triomphe si flatteur vendredi dernier. La foule était extraordinaire, et la manière dont l'actrice a joué ne l'était pas moins.

Quoique le Philosophe sans le savoir soit peut-être le plus raisonnable et le plus naturel de tous les drames, on peut cependant juger par celui-là même combien ce genre est faux et vicieux, et de quels petits moyens on est obligé de se servir, pour étayer un édifice qui menace ruine à chaque instant. Ce n'est qu'à force de hasards et de suppositions peu vraisemblables que la pièce se soutient; elle est toujours prête à s'écrouler. Qui croirait

que le principal fondement de ce drame si imposant, n'est autre que la lubie d'un vieux domestique qui a une mauvaise tête et de mauvais yeux? Si Antoine n'était pas fou, et s'il y voyait clair, il n'y aurait point de pièce.

nom

Il n'y a rien qui ressemble moins à la philosophie du temps que la bonté et la complaisance avec laquelle M. Vanderk excuse la vanité et les dédains d'une sœur, qui tient tout de lui : la douceur à supporter les faiblesses et les défauts d'autrui n'entrait point dans le caractère du philosophe, de celui du moins qu'on désignait par ce vers la fin du dix-huitième siècle. Il n'y avait pas de gens plus égoïstes, plus irascibles, plus intolérans, moins endurans, plus vains et plus ombrageux que les soi-disant philosophes de cette époque. Ce qui me porte à croire que, dans le Philosophe sans le savoir, Sedaine a voulu peindre tout simplement un homme sensé, honnête et vertueux sans prétention, mais point du tout un philosophe du jour. (6 mars 1810.)

LA GAGEURE.

MOLIÈRE a pris dans une nouvelle de Scarron, intitulée les Hypocrites, la scène où Tartufe, accusé par Damis, s'accuse lui-même avec encore plus de chaleur, et séduit Orgon par cette fausse humilité. Molière n'en a pas moins de mérite pour avoir mis en dialogue et en vers un récit en prose: il n'a emprunté à Scarron que l'idée; mais il se l'est rendue propre en l'embellissant. Si Molière a fait l'honneur à Scarron de lui prendre une idée, Sedaine ne s'est pas fait un scrupule de prendre au même Scarron une pièce presque tout entière, la Gageure imprévue. Tout le sujet, toutes les situations se trouvent dans une autre nouvelle de Scarron intitulée

la Précaution inutile, la plus agréable et la plus ingénieuse qu'il ait composée, et où Molière semble avoir puisé le fond de l'École des Femmes.

Dans la nouvelle de Scarron, c'est une jeune duchesse, mariée à un vieux duc catalan. La duchesse, très-curieuse, fait souvent entrer des voyageurs dans son château solitaire, situé sur la grande route; elle s'amuse à causer avec eux dans l'absence de son mari, mais en tout bien et en tout honneur. Le hasard amène sur le chemin un étranger de meilleure mine que tous les autres; elle le fait dîner avec elle et le garde jusqu'à la nuit. Au moment de la séparation, le duc survient; la duchesse fait enfermer l'inconnu dans un petit cabinet dont elle prend la clef. Le duc arrive; elle le divertit par mille contes plaisans qui le font étouffer de rire. Enfin, elle lui propose un pari de cent pistoles dont elle a besoin : c'était son usage de faire ainsi des gageures que le duc perdait avec plaisir. Elle propose au duc de nommer tous les morceaux de fer qui entrent dans la composition d'une maison. Le duc écrit une liste de toutes les ferrailles dont le nom lui vient à la tête, et il oublie les clefs. Alors, la duchesse lui conte son aventure avec l'inconnu : elle lui dit qu'il est enfermé dans son cabinet. Le duc ne trouve pas ce conte-là si plaisant que les autres ; il n'en rit point du tout; demande la clef du cabinet; la duchesse lui fait observer que sur sa liste des instrumens de fer, qui servent à une maison, il n'y a point de clef, et qu'elle ne lui a forgé cette histoire que pour lui faire demander à lui-même ce morceau de fer qu'il a oublié : le duc rit beaucoup, paye et s'en va. La duchesse se hâte de délivrer son étranger, lui fait de riches présens, l'embrasse et le renvoie. Le piquant de l'aventure, c'est que l'étranger est un homme qui croit qu'il n'y a point de sûreté avec une femme d'esprit, et

ne veut épouser qu'une sotte: l'exemple de la duchesse le confirme dans son opinion.

Sedaine avait droit de prendre ce conte de Scarron, qu'il a mis en scène et en dialogue : il a donné à son marquis quelques années de moins, et un caractère de pédant assez comique. Il n'a pu donner à la marquise plus d'esprit, de finesse et d'enjouement; mais il lui a donné plus de bienséance. Les rôles du valet et de la soubrette lui appartiennent, ainsi que l'aventure de la demoiselle enfermée dans l'appartement du marquis, et le mariage de cette jeune personne avec un officier nommé Détieulette : il fallait à Sedaine un dénouement. Enfin, il s'est approprié la narration de Scarron, en l'ornant de plusieurs traits de mœurs : on ne peut l'accuser de plagiat; et cependant il a eu beau faire, le récit de Scarron est aussi amusant à lire que la pièce de Sedaine à voir jouer. (11 janvier 1812.)

COLLÉ.

DUPUIS ET DESRONAIS.

C'EST l'ouvrage d'un homme né avec le talent comique le plus singulier et le plus rare : c'est le seul que possède aujourd'huile théâtre, et cet ouvrage n'est point comique, ou du moins c'est du comique de Térence, qui fait sourire les hommes instruits, les spectateurs délicats, mais qui n'est point assez saillant pour la multitude. Collé était cependant le plus zélé partisan de la gaieté française; il était le plus grand ennemi de ces lugubres romans connus sous le nom de drame : c'est lui qui, dans une ode excellente contre ce genre bâtard, s'est moqué des homélies du

Révérend père Lachaussée,
Prédicateur du saint vallon.

Pourquoi donc semble-t-il avoir oublié sa propre doctrine dans Dupuis et Desronais? Pourquoi a-t-il choisi son sujet dans le roman des Illustres Françaises de Segrais, plutôt que dans le monde et dans la société? Peut-être s'est-il flatté que la singularité du travers de Dupuis serait très-piquante, et que l'intérêt suppléerait au comique : il n'en donnait pas moins un mauvais exemple aux auteurs qui, dans l'impuissance d'imiter son génie, pouvaient s'autoriser de ses faiblesses. Par quel caprice cet écrivain si joyeux, si malin, quelquefois même si peu réservé, a-t-il prodigué pour des sociétés choisies, la gaieté, la

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