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anonyme, il outrage Zaïre par

des soupçons odieux, au lieu de les éclaircir sur-le-champ, comme il peut et doit le faire; enfin, il se contredit sans cesse, et n'a pas la logique de la passion. Il dit à Corasmin :

Ecoute, garde-toi de soupçonner Zaïre.

et personne ne la soupçonne plus que lui; il agit du moins comme le plus rusé, le plus défiant des argus d'une jeune pupille, et ses actions sont la preuve de ses sentimens. Je ne vois donc plus, dans tout le galimatias inutile d'Orosmane, dans tout ce fracas en pure perte, que l'embarras du poëte, qui a besoin d'un meurtre, et ne sait comment l'amener. Cet embarras ne m'intéresse point du tout.

Zaire ne peut réussir qu'autant qu'elle est parfaitement jouée; une forte illusion est nécessaire pour couvrir les vices du plan et du caractère; et le premier jour, cette fameuse Zaïre fut assez mal accueillie, parce qu'elle fut très-mal représentée. « Je suis bien fâché, » écrit l'auteur, que vous n'ayez vu que la première » représentation de Zaïre: les acteurs jouaient mal; le » parterre était tumultueux. . . . . J'ai bien peur de de>> voir aux grands yeux noirs de Melle. Gaussin, au jeu » des acteurs, à ce mélange nouveau des plumes et des » turbans, ce qu'un autre croirait devoir à son mérite. »> Et dans une autre lettre : « Jamais pièce, dit-il, ne fut » si bien jouée que Zaïre à la quatrieme représentation. » Je parus dans une loge, et tout le parterre me battit » des mains je rougissais, je me cachais. » ( 14 brumaire an 12.)

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Voltaire dit dans sa préface de Rome sauvée : « Cette tragédie fut applaudie par le parterre, et beaucoup » plus que Zaïre; mais elle n'est pas d'un genre à se sou>> tenir comme Zaïre sur le théâtre : elle est beaucoup

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sonne

l'an

» plus fortement écrite, et une seule scène entre César » et Catalina, était plus difficile à faire que la plupart » des pièces où l'amour domine; mais le cœur ramène à » ces pièces, et l'admiration pour les anciens Romains » s'épuise bientôt. Personne ne conspire aujourd'hui, et » tout le monde aime. » La dernière phrase est jolie; tithèse entre aimer et conspirer, entre tout le monde et perest faite pour flatter dans tous les temps le goût des lecteurs frivoles: par malheur cela est aussi faux que joli, et il n'y a presque pas un mot qui soit juste et raisonnable dans tout ce passage. Ce qui dégoûte aujourd'hui beaucoup des ouvrages de Voltaire, c'est qu'à l'exception de cette espèce de philosophie qui proscrit les' prêtres, on n'y trouve rien, absolument rien que des idées superficielles, du clinquant, des bluettes et des bouffonneries satiriques.

Si Rome sauvée fut applaudie par le parterre beaucoup plus que Zaïre, cela prouve que les applaudissemens ne prouvent rien. Rome sauvée n'est pas plus fortement écrite, mais plus sèchement, plus froidement, avec moins de naturel et de grâce que Zaïre; aucune de ces deux tragédies n'est fortement écrite. Cette scène entre César et Catalina, que l'on prétend avoir été si difficile à faire, ne vaut pas la peine qu'elle a coûtée ; c'est une scène de rhéteur, dans laquelle Catalina et César parlent comme ils n'ont jamais parlé, et ne disent pas ce qu'ils doivent dire leur entrevue même, dans le moment où on la suppose, est une invraisemblance.

Le cœur ramène aux pièces où l'amour domine, tandis que l'admiration pour les anciens Romains s'épuise bientôt. Quelle erreur! Voltaire, en écrivant cela, comptait sur le succès de sa conspiration contre Corneille. Cette admiration pour les anciens Romains ne s'épuisera jamais ; elle a sa source dans le cœur et dans les sentimens les

plus honnêtes du cœur. Peut-on opposer le cœur à l'admiration pour les anciens Romains ? Oh, la misérable antithèse! Qu'elle est indigne d'un écrivain tel que Voltaire! Et n'est-ce pas le cœur qui admire le vieil Horace, Cornélie, Auguste? N'aurions-nous donc de cœur que pour admirer les fades romans et de folles tendresses? Qu'Orosmane et Zaïre sont petits et mesquins devant ces grands personnages, l'éternel honneur de l'humanité!

Nous voici à la jolie phrase, personne ne conspire aujourd'hui, et tout le monde aime. Par malheur elle ne signifie rien du tout; c'est dommage en vérité. Dans le temps où Voltaire composait cette préface, en 1752, tout le monde conspirait déjà contre les anciennes institutions, et Voltaire était à la tête des conspirateurs. La conspiration s'est tramée pendant plus de trente ans. Il ne fallait pas moins dénaturer et et les esprits de toute l'Europe. Il fallait du temps pour cela; mais enfin la bombe a crevé, et chacun en a ressenti les éclaboussures. Près d'un siècle avant Voltaire, le bon La Fontaine avait déjà dit :

que

corrompre

Amour est mort; le pauvre compagnon
Est enterré sur les bords du Lignon :
Nous n'en avons ici ni vent ni voie.

les mœurs

Personne n'aimait du temps de Voltaire; tout le monde raisonnait et déraisonnait : l'esprit philosophique s'allie mal avec l'amour; il s'accommode mieux des jouissances physiques. (12 mars 1817.)

ALZIRE.

Je n'ignore pas quels orages ont excité contre moi des observations purement littéraires sur les tragédies d'un poëte célèbre, depuis long-temps l'objet d'un culte qui

dégénérait en idolâtrie : des remarques sur l'art dramatique ont été traitées de sacriléges; on a voulu même en faire des crimes d'état; tant les disciples de Voltaire pratiquent bien la doctrine de leur maître, tant ils sont doux, humains, tolérans !

Je n'ai jamais dit que les pièces de Voltaire restées au théâtre fussent de mauvaises tragédies; c'est une absurdité qu'on m'a prêtée gratuitement : et s'il faut ici fermer la bouche aux imposteurs par une profession de foi bien nette, je déclare que je mets au rang des meilleurs ouvrages composés depuis Racine, Mérope, Zaïre, Mahomet, Alzire, qui me paraissaient les quatre chefsd'œuvre de Voltaire. Il y a dans ces pièces des caractères brillans, des situations pathétiques, des tirades très-éloquentes, des sentences admirables, et de très-beaux vers. D'autres tragédies, telles qu'OEdipe, Mariamne, Brutus, sans avoir autant d'éclat au théâtre, se distinguent par un style pur et correct, par une marche régulière, une élégance souvent digne de Racine et une grandeur qui s'approche quelquefois de celle de Corneille. D'autres pièces, telles que Sémiramis, l'Orphelin de la Chine, Tancrède, Rome sauvée, Oreste, quoiqu'inférieures sans doute, offrent un grand nombre de morceaux et de scènes qui décèlent un talent très-heureux et très-distingué. Telle a toujours été mon opinion sur le théâtre de Voltaire si dans l'examen que j'ai fait de plusieurs de ces pièces, je n'ai presque rien dit des beautés, c'est qu'elles étaient admirées et prônées au delà même de leur mérite; c'est que l'enthousiasme des partisans de Voltaire s'efforçait de combler l'intervalle qui le sépare de Corneille et de Racine, et même lui dressait un trône au-dessus des deux maîtres de notre scène. Uniquement occupé du soin de m'opposer à cette injustice, j'ai plus appuyé sur les critiques que sur les éloges en cela ma bonne

:

foi a manqué d'adresse. J'ai peut-être trop heurté de front un préjugé que j'aurais combattu avec plus d'avantage, en paraissant le ménager, et ma simplicité a fourni des armes à des écrivains perfides, qui ont dénaturé mes intentions. J'ai révolté les amans de Voltaire, en leur montrant les défauts de l'objet aimé.

Mais, dira-t-on, ne doit-on pas des égards à un homme supérieur? Les plaisanteries, les sarcasmes, l'ironie, ne sont-elles pas déplacées, indécentes? Ne donnent-elles pas à la critique la plus raisonnable, l'air d'une injuste satire? Peut-être ai-je été séduit par l'exemple de Voltaire lui-même, qui, dans son commentaire sur Corneille, n'épargne pas les railleries et les épigrammes, à ce à ce grand homme si simple, si franc, si modeste, dont les beautés sont à lui, et les défauts à son siècle. J'avoue qu'un pareil caractère commande le respect: il s'en faut beaucoup que celui de Voltaire soit aussi noble, aussi imposant, quand on se rappelle à quel point il a dégradé l'honneur des lettres, quels démentis il a donnés à ses écrits! Quand on songe qu'il a vomi les plus dégoûtantes ordures contre le citoyen de Genève, un de ses plus grands admirateurs, qui n'avait à ses yeux d'autre crime que d'être trop fameux; quand on se souvient des traits sanglans qu'il a lancés contre Lefranc, contre Gresset, coupable seulement d'avoir des mœurs et des vertus; quand on a lu ses pamphlets cyniques, ses lettres pleines de fiel et d'orgueil, ses infâmes diatribes contre des critiques honnêtes, tels que Larcher, qui n'avaient que le malheur d'avoir raison contre lui, il faut convenir que la Divinité paraît un profane, et ́ qu'on ne se fait pas toujours un devoir de respecter un homme qui n'a rien respecté lui-même : on ne regarde pas comme un grand crimede plaisanter quelquefois celui qui a si cruellement abusé de la plaisanterie, D'ailleurs,

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