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l'avis du père, vient tout enflammé se présenter à Blanche; il la trouve avec Montcassin, et l'accueil qu'on lui fait ne répond pas à ses espérances. Il s'ensuit nécessairement une explication entre Blanche et son père : Contarini veut absolument que sa fille épouse Capello. En vain Blanche pleure et crie, en vain Montcassin s'emporte et fulmine comme un amoureux de drame. Le maudit vieillard reste inflexible. Dans cette extrémité, Montcassin demande un rendez-vous nocturne à Blanche; et Blanche, qui n'est point scrupuleuse, quoique fort dévote, lui donne un rendez-vous dans la chapelle domestique du palais de son père. Pendant que les deux amans, devant l'autel, prennent Dieu à témoin de leurs sermens, le père arrive avec Capello, qu'il veut marier secrètement avec sa fille, pour qu'il ne puisse plus s'en dédire. Montcassin n'a que le temps de se sauver par une fenêtre, qui donne sur le palais de l'ambassadeur d'Espagne ; il est pris voulant franchir les murs de ce palais, et traduit devant les trois inquisiteurs d'état, comme ayant violé la nouvelle loi qui défend aux nobles vénitiens de communiquer avec les agens des puissances étrangères. Les inquisiteurs lui font son procès dans une chambre tendue de noir, et on l'étrangle derrière un rideau noir qui est au fond de la chambre. Quand l'affaire est faite, Blanche arrive au tribunal, et veut plaider la cause de son amant; mais on lève le rideau, et on lui fait voir que les inquisiteurs sont des juges expéditifs.

C'est bien là une aventure funeste; mais ce n'est point une fable tragique. Les amans sont fous, le père est un vieux scélérat, Capello un pauvre homme; tout cela est trivial : c'est une querelle de famille qui aboutit à la potence. Le plus grand malheur, c'est que la pièce est écrite en vers durs, froids et secs, et que les pensées

répondent au style; voici quelques exemples. Contarini demande à Capello s'il aime Blanche, et celui-ci répond:

Ce

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Ah! vingt fois pour le dire,

Ma bouche s'est ouverte; et vingt fois différé

Cet aveu plus pénible en ma bouche est rentré!

que c'est qu'un amant timide! Ces vers font image: on croit voir Capello ouvrant une grande bouche sans rien dire; l'aveu prêt à sortir, et ne sortant point : ce c'est de savoir comment cet aveu a qui m'embarrasse, pu rentrer en la bouche, puisqu'il n'en est point sorti. Capello, craignant qu'on n'interprète mal sa timidité ajoute :

Ce n'est pas qu'un instant je me sois cru possible

De vaincre un sentiment, qui toujours invincible, etc.

Je me sois cru possible, est une phrase barbare, pour j'ai cru qu'il m'était possible.

Cet éloge de Capello, qui sort de la bouche de Contarini, mérite aussi d'être remarqué pour la tournure :

Je connais, j'admire avec l'Europe entière,
Cette âme tour à tour politique et guerrière,
Qui dans nos murs l'effroi du crime pálissant,
Aux mers de l'Archipel le fléau du Croissant,
Du lion plus terrible étendit la puissance,

De la mer de Venise à la mer de Byzance.

On ne sait si c'est cette áme ou nos murs qui sont l'effroi du crime pálissant, si c'est l'Archipel ou cette áme qui est le fléau du Croissant, et si le lion est plus terrible le Croissant: ces vers ne sont qu'un pénible galimatias.

que

Voici un morceau brillant où M. Arnault semble avoir eu dessein de lutter contre Racine. Blanche peint la cérémonie de la réception de Montcassin parmi les nobles vénitiens, comme Bérénice peint l'apothéose de Vespasien par Titus; mais il y a la même différence

entre le style et le ton de ces deux morceaux, qu'entre les deux tragédies, qu'entre une reine aimée du maître du monde, et la fille d'un inquisiteur vénitien, maîtresse d'un aventurier français :

Jamais rien de plus beau n'avait frappé ma vue;
Quel spectacle, en effet, nos palais et nos mers,
D'un peuple admirateur et chargés et couverts,
Les prêtres, le sénat, le doge et la noblesse,
Conduisant au milieu de la publique ivresse,
Ce Français revêtu des marques de son rang,
Publiant que
les droits que leur transmit le sang,
Des vertus une fois seront le privilége.

Rien n'est plus commun, plus bourgeois, plus pauvre d'imagination et de poésie, qu'une pareille description, surtout si on la compare à celle de Racine.

Blanche demande à sa nourrice, qui est sa mère par son lait :

Eh bien, crois-lu qu'il m'aime?

Et la nourrice répond :

Eh comment ne pas croire, Ma fille, à tant d'amour prouvé par tant de gloire! Ce ton est vraiment comique quand on pense que tant de gloire se réduit à une dénonciation et à un combat contre des brigands, et que ce sont là les preuves de tant d'amour.

Si l'on veut du sentiment exalté, de la passion extravagante, du délire amoureux, en voici :

Oui, je sens que je l'aime autant qu'on peut aimer;
Et ce transport qu'en vain je voudrais réprimer,
Et l'entier abandon de ma douce existence,
N'est en moi que justice et que reconnaissance.
L'excès de mon amour peut lui seul m'acquitter
De tout ce qu'un héros fit pour le mériter.

Voilà une fille bien patriote! Pourrait-elle refuser l'a

bandon de sa douce existence au héros qui a dénoncé une conspiration?

Quoi de plus larmoyant que les vers suivans:

Mais quoi, mes yeux baissés ne cachaient pas mes larmes?
Sur ses tremblantes mains il les sentit couler;

Sur ses tremblantes mains dont il pressait les miennes,
Mes larmes en torrent couraient chercher les siennes.

Ces détails ne sont-ils pas plaisans dans une tragédie? Et ces larmes qui vont en torrent chercher les mains tremblantes de l'amant, ne sont-elles pas du style le plus burlesque? La plus grande partie de la pièce est écrite dans ce goût. Je ne citerai plus qu'une tirade, c'est la réponse de Montcassin à Contarini, qui prétend que Blanche sa fille a promis sa foi à un autre :

Eh! ne savez-vous pas que seul je l'ai reçue
Cette foi tant jurée, et qu'en ce jour fatal

L'apparence un instant promit à mon rival?

Seigneur, je la reçus quand cherchant dans l'absence, etc.

Seigneur, je la reçus quand la vertu sévère, etc.

Seigneur, je la reçus dans ce jour de victoire, etc.

Confirmez ce lien qui, dans vos jours vicillis,
Vous conserve une fille et vous acquiert un fils.

Un homme du parterre a crié : Renvoyé à Londres et sa motion a été appuyée. Il faut laisser aux Anglais leurs échafauds, leurs exécutions, leurs horreurs monstrueuses chez une nation qui a Corneille et Racine on ne fait point étrangler un homme derrière un rideau pour finir une tragédie. ( 6 décembre 1807.)

MELLE. CANDEILLE.

LA BELLE FERMIÈRE.

La belle Candeille est l'auteur de la Belle Fermière : elle y jouait elle-même le principal rôle en 1792, et quoiqu'actrice médiocre, elle ne démentait pas du moins le titre de la pièce : elle avait raison de se plaindre de la malice de ses camarades, qui, en annonçant l'ouvrage sous ce titre, n'avaient pas craint de rendre la figure de Melle, Candeille responsable de la vérité de l'annonce; mais les spectateurs, en voyant la Belle Fermière, lui pardonnèrent d'avoir mis sa beauté sur l'affiche: ce titre flatteur fut conservé à l'impression; il reste encore dans les annonces, aux risques et périls de celles qui ont succédé et succéderont à Melle, Candeille dans ce rôle.

Avec des traits charmans et toute l'intelligence que doit avoir un auteur, l'actrice à qui nous devons la Belle Fermière éprouva beaucoup de désagrémens au théâtre, et se vit forcée à la retraite : elle était froide, son organe était sourd et voilé; ses autres talens la consolèrent d'un malheur si léger : en cessant d'être comédienne, elle gagna plus de considération sans perdre aucun de ses moyens de plaire : belle, pleine d'esprit et de grâces, excellente musicienne, comblée de tous les dons qui peuvent enchanter l'âme et les sens, avait-elle

donc besoin d'un théâtre ?

La Belle Fermière est un roman : il faut donc nous résoudre à n'avoir que des romans sur la scène, puisque

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