Εικόνες σελίδας
PDF
Ηλεκτρ. έκδοση

On rend hommage à leurs douces faiblesses,
Et l'Amour seul en a fait des déesses.
Imitez-les vous avez leur beauté,

Ayez encor leur sensibilité.

Au rang des dieux vous monterez comme clles;
L'Olympe attend les héros et les belles.

Si l'Amour faisait des déesses, l'Olympe ne serait pas assez grand pour contenir tant de divinités. Feu Céladon parlait moins ridiculement que cet Anaximandre qu'on prétend inspiré par les Grâces. Aspasie, qu'on nous donne cependant comme une fille sensée, se laisse enivrer d'un encens si grossier, et se dit à elle-même :

Cet amant-là, sans mentir, est charmant.

Elle ment sans doute ou plutôt sa vanité la trompe; mais du moins elle est polie et ne demeure point en reste d'éloges avec son philosophe :

Je l'avourai, vous louez joliment;

Vos discours ont des grâces que j'admire,

Les flatteries les plus outrées séduisent l'amour-propre, je le sais, mais il est contraire au caractère d'Aspasie de se laisser ainsi duper et de prendre de fausses louanges pour l'expression d'un amour véritable: elle est bien sotte si elle croit sur la parole d'Anaximandre, qu'elle, va devenir déesse en devenant amoureuse, 1'0lympe l'attend parce qu'elle est belle.

et que

Rien n'est plus usé au théâtre que les philosophes et les sauvages apprivoisés et polis par l'amour. L'Anaximandre de M. Andrieux n'est donc, sous ce rapport, qu'une copie du Démocrite de Regnard, de celui d'Autreau, et de plusieurs autres. Il ne faut pas confondre ces philosophies de l'antiquité avec nos philosophes du dix-huitième siècle, gens du beau monde, presque petitsmaîtres, et qui vivaient trop avec les femmes pour con

naître l'amour. Le contraste du caractère des deux sœurs n'est pas plus neuf; on ne voit au théâtre que des Agnès et des Espiègles, et quelquefois la même fille est l'une et l'autre. C'est Phrosine l'Espiègle qui conseille au philosophe de s'habiller à la mode pour plaire à l'Agnès Aspasie :

Défaites-vous de cette barbe énorme

Qui vous déguise et qui vous rend difforme;
Ce manteau brun vous vieillit de dix ans.
Quittez cela; voyez nos élégans :

C'est un habit qu'il faudra qu'on vous brode;
Je vous dirai la couleur à la mode.

Tous ces points-là, chez vous autres savans,
Semblent des riens ces riens sout importans;
Ils font valoir la taille, la figure;

:

Adonis même eut besoin de parure.

Est-ce une jeune Grecque, élevée sous la tutelle d'un philosophe, qui peut parler ainsi à son tuteur? N'est-ce pas plutôt une de nos grisettes, une de nos marchandes de modes? L'amour d'Anaximandre n'est-il pas celui d'un Cassandre, lorsque ce philosophe répond que ponr plaire à son Aspasie, il braverait le ridicule, et se ferait volontiers chansonner par la ville? Toute cette conception est fausse; les grâces ne consistent point dans une toilette peu convenable au caractère et à l'état du personnage, dans des propos extravagans d'une fade galanterie dont on n'avait pas l'idée dans la Grèce et même en France; toutes les femmes sensées se moquent de cet impertinent jargon et de cette affectation d'élégance : une honnête simplicité, un ton naturel et vrai leur plaisent davantage dans un homme, et leur inspirent plus de confiance. Comment un auteur aussi délicat et aussi galant que M. Andrieux, n'a-t-il pas craint d'offenser le beau sexe en supposant qu'il n'est sensible qu'à des dehors frivoles? Il n'y a que des folles et des sottes que la fatuité séduit;

mais M. Andrieux peut rejeter une partie de la faute sur une romance qui lui a fourni l'idée de sa pièce. Il est vrai que la galanterie langoureuse est plus à sa place dans une romance, que dans une pièce de théâtre qui doit peindre les mœurs. Le refrain de cette romance est d'une morale un peu relâchée :

L'esprit et les talens font bien,

Mais sans les grâces ce n'est rien.

1

Il s'agirait de savoir lequel vaut le mieux des grâces sans esprit et sans talent, ou de l'esprit et des talens sans les grâces; car il est un peu hardi de dire que l'esprit et les talens ne sont rien sans les grâces; surtout sans cette espèce de grâces extérieures que les sots possèdent beaucoup plus que les gens d'esprit. Il faut donc que l'Institut se mette à la mode pour que son esprit et ses talens soient quelque chose. Plaire à des coquettes, avoir de bonnes fortunes, ne point trouver de cruelles, n'est pas le suprême bonheur d'un philosophe et d'un honnête homme; et si ce n'est que pour cela qu'il faut sacrifier aux Grâces, on peut se dispenser du sacrifice.

Ces maximes galantes passent dans une romance, mais on ne peut pas établir une comédie sur un si mauvais fonds. L'Anaximandre de M. Andrieux est écrit avec esprit et facilité : ce n'en est pas moins un ouvrage froid, vide, et qui ne porte que sur des idées fausses; son plus grand mérite est dans le jeu des acteurs, qui se sont surpassés pour échauffer et faire valoir une bagatelle aussi mince. De même que la musique a plus de prise sur des vers faibles, le jeu des acteurs brille davantage dans les pièces médiocres. Damas est plein de chaleur et de sensibilité dans le rôle d'Anaximandre: son talent anime la galanterie la plus fade. Melle. Volnais a joué le rôle d'Aspasie avec beaucoup de grâce, d'ingénuité et de dé

licatesse : elle a été fort applaudie en paraissant, et plus encore quand on l'a attendue. Meile. Bourgoin est trèsaimable dans la comédie : elle a mis de la finesse, de la vivacité et de l'enjouement dans son rôle de Phrosine; peut-être l'a-t-elle rendu trop au naturel, car le poëte a fait de cette Phrosine une petite créature d'assez mauvais ton; et Melle. Bourgoin eût peut-être essayé de mettre plus de réserve et de modestie dans son jeu, si elle eût osé prendre la liberté de corriger le poëte. ( 24 vendémiaire an 14.)

LES ÉTOURDIS.

LES Étourdis sont le seul ouvrage où M. Andrieux ait annoncé quelque talent pour le comique du troisième ordre : j'appelle ainsi la comédie de pure intrigue, sans mœurs et sans caractère. Le dialogue est vif, enjoué, pétillant; mais il n'y règne pas toujours un choix de plaisanteries assez délicat. La scène du valet avec la vieille est d'un comique bas et usé; celle du jeune homme qui fait le revenant sent un peu la farce, et n'est pas aussi bien neuve l'Esprit Follet et quelques autres pièces offrent des situations à peu près semblables; une ancienne comédie de Hauteroche, intitulée le Deuil, où un jeune homme fait passer son père mort, afin d'escroquer de l'argent à son fermier, renferme le fond de l'idée, et même quelques détails des Étourdis; au reste, l'ensemble de cette pièce est amusant et d'une gaieté franche: cela promettait plus que l'auteur n'a tenu. La politique s'est montrée jalouse de la poésie; et trop long-temps occupé à faire des lois, M. Andrieux a montré dans Helvétius qu'il avait oublié à faire des comédies; ce n'est pas, au reste, un reproche à lui faire; il a choisi la meilleure et

la plus noble part. Que ne puis-je ajouter: Quæ non auferetur ab eo!

Melle, Bourgoin a joué pour la première fois le rôle de Julie: elle y a mis de la gentillesse, de la grâce un peu maniérée; ce qu'il faut peut-être attribuer à l'embarras qu'elle éprouve encore sur la scène. On cût désiré un peu plus d'ingénuité, de naturel et de sentiment. Sa voix n'est pas assez assurée : elle sort de la gorge. Je crois qu'avec de l'étude elle peut être très-agréable dans les jeunes amoureuses de la comédie. (11 messidor an 10.)

MOLIÈRE AVEC SES AMIS,

OU LE SOUPER D'AUTEUIL.

Iz est plus facile de faire des pièces sur Molière, que d'en faire comme Molière : c'est honorer très-médiocrement ce père de la comédie, que de mettre sur la scène ses faiblesses et ses petites misères domestiques : pour le louer dignement, il faudrait l'imiter. Cette bagatelle de M. Andrieux est au-dessous de son auteur, au-dessous du théâtre où elle se produit: ce n'est qu'un vaudeville; elle en a l'esprit, le ton, la frivolité : les pointes ne lui manquent pas ; il ne lui manque que les couplets.

Nous avons vu à Louvois, Molière chez Ninon ; nous l'avons vu chez lui avec ses amis, dans la rue de Chartres; le Théâtre Français possède la Maison de Molière Molière est partout; il n'y a que son bon sens et son génie qui ne se trouvent nulle part. L'anecdote dont M. Andrieux s'est emparé, ne convenait qu'au Vaudeville; il fallait la lui laisser. Un auteur, il est vrai, est bien aise de se mettre à l'abri des sifflets derrière nos grands hommes. Des personnages tels que Molière, Boileau, La Fontaine, sont de bons garans du

« ΠροηγούμενηΣυνέχεια »