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pouse un vil menteur, et que son très-imprudent frère n'approuve l'alliance: dénouement très-froid et sans aucun intérêt. Qu'importe qu'un fourbe épouse une coquette; ce n'était pas la peine de faire cinq actes pour amener cette conclusion.

Il est honorable pour le père de notre scène, qu'un homme qui a autant d'esprit que M. Andrieux n'ait pu parvenir, même en y pensant bien, à faire quelque chose d'aussi bon que le mauvais du vieux Corneille. Ce n'est pas qu'il y ait de la facilité et de la gaieté dans le style; plusieurs mots heureux, plusieurs plaisanteries agréables, quelques situations comiques : mais tout cela est noyé dans des longueurs. Dorante est un conteur assommant : ses histoires, si l'on excepte celle de la courtisane de Venise, ne sont pas amusantes ; et si c'était un autre que Fleury qui les racontât, on ne le laisserait pas aller jusqu'à la fin. Fleury a fait des prodiges; il a soutenu la pièce à la sueur de son front: il se donnait tant de mouvement qu'on était forcé de l'écouter. L'ouvrage doit beaucoup aux acteurs; les rôles de Mélisse et de Lucrèce sont très-bien remplis par Melle. Mars et Melle. Volnais. Thénard et Melle. Devienne ont fait rire. Armand joue Cléandre, et Baptiste aîné, Ariste : ces rôles nécessairement un peu sérieux ne permettaient aux acteurs que le mérite de l'intelligence et du débit.

en

Je ne sais si je me trompe (dit Voltaire, à la fin de son Commentaire sur la Suite du Menteur de Corneille), mais en donnant de l'âme au caractère de Philiste, mettant en œuvre la jalousie, en retranchant quelques mauvaises plaisanteries de CLITON, on ferait de cette pièce UN CHEF-D'Œuvre.

Voltaire se trompait; cela n'est pas douteux. M. Andrieux a plus fait que de donner de l'âme à Philiste, et de mettre en œuvre la jalousie : il a créé le rôle de Lu

crèce; il a mis Dorante aux prises avec la femme qu'il avait quittée le jour de ses noces; enfin, il a fait un nouveau Menteur, et n'a pas fait un chef-d'œuvre. (31 octobre 1808.)

LE VIEUX FAT,

OU LES DEUX VIEILLARD S.

L'AUTEUR du vieux Fat débuta par Anaximandre, pièce galante, fort peu dramatique, riche en vers musqués et en petits madrigaux les plus jolis du monde. A cette galanterie succéda une comédie vive, enjouée, piquante: les Etourdis promettaient un successeur de Regnard, et n'ont pas tenu parole; cette pièce, le second ouvrage de l'auteur, est restée son chef-d'œuvre : je ne sais si c'est la nature de son génie ou celle des circonstances qui ne lui a pas permis d'aller plus loin, et qui depuis l'a forcé de rétrograder.

Il y a une très-grande distance des Etourdis à Helvétius, joué à Louvois. Ce petit drame avait, entr'autres inconvéniens, celui d'exalter un écrivain très-immoral: l'auteur y avait mêlé mal à propos, aux louanges d'Helvétius, quelques personnalités, quelques traits satiriques. Cette pièce, au-dessous même du théâtre où elle fut j ›née, n'annonçait pas un homme capable d'embellir Corneille. La Suite du Menteur, revue et corrigée par M. Andrieux, est une de ses entreprises les moins heureuses; elle a deux fois échoué sur deux théâtres.

Le Trésor n'en fut pas un pour Louvois ; c'est cependant ce que l'auteur a fait de mieux depuis les Etourdis. La petite pièce de Molière chez ses amis se joue quelquefois aux Français elle doit cet avantage à l'intérêt qu'inspirent les grands hommes qu'on y fait parler;

mais je n'aime pas, je l'avoue, qu'on ait mis sur la seène une pareille anecdote, où les plus beaux-esprits du siècle de Louis XIV sont réduits à l'état des bêtes. Je trouve plus déplorable que plaisante cette métamorphose des plus rares génies de l'univers, en une troupe d'ivrognes qui, trop pleins de vin, veulent s'aller jeter à l'eau. Enfin, M. Andrieux a fait un dernier effort, et nous offre aujourd'hui une comédie de caractère.

Le contraste des deux vieillards, dont l'un est fat et l'autre raisonnable, est une idée plus philosophique que théâtrale. Le vieillard sensé est froid et nul sur la scène; le vieillard libertin est insipide et dégoûtant. Colin, dans sa comédie du Vieillard et des Jeunes Gens, avait montré la vieillesse sous les traits les plus nobles et les plus intéressans. Si la mort n'eût pas ravi à M. Andrieux ce précieux ami, Colin l'eût peut-être dissuadé de fonder une comédie en cinq actes sur la turpitude d'un vieillard imbécille qui veut faire l'aimable, le roué, l'homme à bonnes fortunes, le spadassin, et qui occupe trop longtemps la scène de cette plate caricature. Ovide a si bien dit :

Turpe, senex miles!

« C'est un objet hideux qu'un vieillard engagé dans la » milice amoureuse. » Nous en avons cependant beaucoup de cette espèce dans nos anciennes comédies; mais ces vieillards ne font point l'amour en jeunes gens ; ils ne sont d'ailleurs que des personnages subalternes, dont on rit en passant. Le vieillard de M. Andrieux est un vieillard petit-maître, un vieillard singe de toutes les grimaces des petits étourdis du bon ton, un vieil Adonis, un fat qui se croit aimé de toutes les femmes ; et c'est là le personnage dominant, le caractère principal. Ce travers n'est pas commun aujourd'hui; un tel fou lit sa

condamnation dans les yeux de toutes les femmes, et n'a pas besoin des leçons de Thalie.

Autrefois, quand la galanterie était à la mode, les femmes encourageaient ces doyens de Cythère : les fers de ces vieux captifs étaient pour elles des trophées; elles se piquaient de triompher des glaces de l'âge. Ily avait encore à la cour, au commencement du règne de Louis XIV, de vieux seigneurs très-aimables; l'esprit et la politesse semblaient les rajeunir; ils surpassaient les jeunes gens en galanterie ; ils avaient sur eux de grands avantages dans les cercles, où l'on ne cherchait que les agrémens de la conversation. Le vieux fat de M. Andrieux n'est qu'un bourgeois très-sot et grossièrement vain, un miais berné par un bas flatteur, et qui imite les manières des jeunes gens à peu près comme le bourgeois gentilhomme imite les manières des courtisans: le bourgeois gentilhomme est très-comique, parce qu'il y a beaucoup de naturel dans sa folie; le vieux fat n'est point comique, parce que sa folie répugne à la nature. Une grande preuve que le vieux fat n'est pas comique, c'est qu'on n'en rit presque point. Les longs dialogues de ce Cassandre musqué avec son flatteur Pierrot, autrement dit Labrosse dans la pièce, ne sont interrompus ni par des applaudissemens, ni par des éclats de rire.

Le plus agréable et le plus ingénieux de nos romans français, le Git Blas de Le Sage, dans la foule des ridicules et des travers dont il nous offre la peinture, nous montre aussi un vieux seigneur libertin, qui a une maîtresse, et s'imagine en être aimé pour lui-même. C'est un grand homme sec et pâle; on le voit à sa toilette, employant, pour réparer des ans l'irréparable outrage, tous les raffinemens d'une vieille coquette; mais c'est en récit qu'on le voit ce tableau déplairait sur la scène. Gil Blas, valet du vieux galant, le flatte aussi.comme

Labrosse flatte le vieux fat : il vante le discernement et le bon goût de sa maîtresse Euphrasie; il est même assez impudent pour avancer qu'elle ne pouvait avoir un galant plus aimable. Le bonhomme ne sent point qu'on se moque de lui: cette flatterie si outrée et si grossière ne lui paraît qu'un hommage sincère rendu à la vérité. Gil Blas découvre l'infidélité d'Euphrasie, et croit remplir le devoir d'un serviteur fidèle, en instruisant son maître de l'affront qu'on lui fait; le vieillard prend le parti de sa maîtresse, et chasse, pour lui plaire, le trop véridique valet. Pour contraster avec ce vieux galant, l'auteur du roman nous présente un bon et sage vieillard qui laisse voir ses cheveux blancs, s'appuie sur un bâton, et se fait honneur de sa vieillesse, au lieu de vouloir paraître jeune. Tous ces détails sont meilleurs à décrire dans une narration qu'à exposer sur la scène; et ce morceau du roman de Le Sage est bien supérieur à la comédie de M. Andrieux, qui peut-être en a puisé dans cette source la première idée.

Le vieux fat me paraît donc un caractère mal choisi et peu convenable au théâtre; l'auteur a été plus malheureux encore dans l'invention de son intrigue, qui est froide et commune, dépourvue de toute espèce d'intérêt. Le bon et sage vieillard, nommé Rollin, a une fille qui s'appelle Constance. Cette fille a pour amant un jeune officier du génie, nommé Linant, qui s'est introduit secrètement dans la maison comme architecte, sous le nom de Durand. Le père de Constance veut lui faire épouser Charles, son commis, homme honnête, sensible et vertueux, qui n'a rien, et dont le plus grand défaut, aux yeux de Constance, est d'avoir trente-quatre ans. Cette Constance a un troisième amoureux ; c'est le vieux fat celui-là n'est pas encore déclaré, et n'est point dangereux. Pressée trop vivement par son père, Constance

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