Εικόνες σελίδας
PDF
Ηλεκτρ. έκδοση

soient cultivés par de bonnes études, et qui aient ce qu'on appelle de la littérature.

Or, maintenant, suez, graves auteurs, etc,

Après cet éclair de raison, Voltaire, aveuglé par l'amourpropre, retombe aussitôt dans les sophismes de cette incertitude dans l'opinion publique, il conclut que les journaux ne doivent pas juger les pièces parce qu'ils ne savent pas si le public à la longue jugera comme eux. Voltaire suppose que le dernier jugement du public est toujours le meilleur; ce qui est évidemment faux.: la manière dont il accueille aujourd'hui plusieurs chefsd'œuvre comiques du siècle de Louis XIV, est la preuve du contraire: on reconnaît ici l'intérêt personnel d'un homme qui écrivait pour les ignorans, qui tendait des piéges à la multitude, et par conséquent devait avoir beaucoup d'humeur contre les journalistes qui éclairaient le public.

A quel point un auteur se fait illusion à lui-même ! Comme il s'aveugle sur ses défauts! « On s'est récrié » contre le duc de Vendôme, dit l'auteur d'Adélaïde. » La voix publique m'a accusé d'abord d'avoir mis sur » le théâtre un prince du sang pour en faire, de gaieté » de cœur, un assassin. Le parterre est revenu tout d'un >>coup de cette idée; de cette idée; mais nos seigneurs mais nos seigneurs les courtisans,

qui sont trop grands seigneurs pour se dédire si vite, » persistent encore dans leur reproche. » Cet impertinent sarcasme contre nos seigneurs les courtisans, prouve qu'ils avaient du moins beaucoup de grandeur d'âme et de générosité : car au lieu de combler d'éloges et d'égards un faquin de poëte qui s'oubliait à ce point-là, ils auraient pu le remettre à sa place et le faire rentrer en luimême dans ce temps-là, le public et les courtisans avaient également raison d'être choqués qu'un auteur

:

dramatique présentât sur la scène comme un vil assassin, comme le meurtrier de son frère, un prince supposé du sang de France: un écrivain ne doit jamais rien exposer au théâtre qui tende à l'avilissement de la nation. dont il fait partie, et du gouvernement établi sous lequel il vit. C'est une maxime qui s'accorde très-bien avec les grands principes de la liberté et de l'égalité, et surtout avec la tranquillité publique : il y a certaines bienséances sociales qu'on ne peut violer sans une indécence coupable: une tragédie est si peu de chose en comparaison du respect qui doit toujours environner les dépositaires de l'autorité, et tout ce qui les touche de près! Si nos seigneurs les courtisans ont plus insisté sur ce reproche que le parterre, ce n'est pas parce qu'ils étaient plus grands seigneurs ; c'est qu'ils avaient un tact plus délicat et plus sûr de cette espèce de convenance.

ככ

« Pour moi, ajoute Voltaire, s'il m'est permis de me >> mettre au nombre de mes critiques, je ne crois pas que >> l'on soit moins intéressé à une tragédie, parce qu'un » prince de la nation se laisse emporter à l'excès d'une passion effrénée. » Que devient donc l'esprit de Voltaire, quand son orgueil est en jeu? Il est bien question ici d'intérêt; il s'agit de bienséance : qui doute que le peuple, toujours trop disposé à la licence, ne s'intéressât beaucoup à tout spectacle piquant par quelque hardiesse contre les grands ou le gouvernement? Il semble qu'il n'y ait rien dans un état au-dessus de l'intérêt d'une tragédie, et pourvu que la pièce plaise, que personne ne peut y trouver à redire : quel pitoyable raisonnement de poëte égoïste!

Cependant Vendôme, tout prince qu'il est, n'intéresse pas, non parce qu'il est prince, mais parce que c'est un bas et vil scélérat, indigne du titre de chevalier; parce que c'est un lâche brigand, qui, au lieu de disputer sa

maîtresse par la voie des armes, veut se l'assurer par le plus infâme assassinat; par un assassinat médité, puisque le monstre persiste dans sa résolution pendant plus de trois heures; puisqu'après avoir eu le temps de réfléchir dans l'intervalle d'un acte à l'autre, il envoie par précaution un second assassin pour tuer son frère, ne se fiant pas assez au premier. Fayel, dans Gabrielle de Vergi, n'assassine pas l'amant de sa femme, qui est en son pouvoir; il lui offre le combat: dans cette pauvre pièce du Tasse, le scélérat Monsini n'assassine pas son rival, qui est entre ses mains, il lui offre le combat; il n'y a que l'illustre Vendôme, ce généreux prince français, ce magnanime chevalier, qui, tenant son frère prisonnier de guerre, le fait enfermer dans une tour pour l'y égorger à son aise, et lui ravir sa femme : il était réservé à Voltaire de peindre une horreur et une bassesse de cette nature, et à ses disciples d'admirer une action aussi honteuse, une aussi abominable lâcheté : la passion peut excuser tout au théâtre, excepté la bassesse. Il y a d'autres raisons du peu d'intérêt que Vendôme inspire; Voltaire ne les dissimule pas, et la plus forte de toutes, il n'a pas même l'air de la soupçonner : « Mais ce Vendôme, dit-il, n'intéresse peut-être pas assez, parce

qu'il n'est point aimé, et parce qu'on ne pardonne » point à un héros français d'être furieux contre une » honnête femme qui lui dit de si bonnes raisons. Coucy >> vient encore prouver à notre homme qu'il est un pauvre » homme d'être si amoureux : tout cela fait qu'on ne » prend pas un intérêt bien tendre au succès de cet » amour. » Voltaire devrait bien nous expliquer comment ce Vendôme et son amour, qui n'intéressaient point en 1734, sont devenus intéressans en 1765; comment un si pauvre prince, un homme vil et si bas, a pu devenir un héros tragique : c'est peut-être, comme le dit

Voltaire, parce que le sieur Dufresne avait joué le rôle indignement. Le sieur Dufresne avait cependant joué admirablement Orosmane; cela aurait dû lui apprendre comment on jouait les fous et les enragés. Quoi qu'il en soit, le Kain joua depuis Vendôme de manière à couvrir les défauts du personnage. ( 20 thermidor an 10.)

L'ORPHELIN DE LA CHINE.

CORNEILLE et Racine nous avaient présenté au théâtre les deux premiers peuples de l'univers, les Grecs et les Romains; Voltaire, pour varier la scène et nourrir la curiosité, nous conduisit en Palestine et en Arabie ; il nous fit faire un voyage au nouveau monde, et enfin poussa jusqu'à la Chine. Il n'y a point de poëte qui ait fait voir à sa nation autant de pays : il était surtout à l'affût de ces grandes époques qui frappent les esprits : les croisades, l'établissement de la religion de Mahomet, la découverte de l'Amérique, la conquête de la Chine par les Tartares; voilà les tableaux qu'il offrait à la multitude étonnée : il est vrai que souvent la faiblesse de l'intrigue ne répondait pas à la magnificence du sujet ; mais de pompeuses déclamations couvraient la mesquinerie de la fable, et au théâtre ce sont les lieux communs et les situations qu'on applaudit, jamais la beauté du plan et la sagesse de la conduite.

Les contrastes bien tranchans entre les mœurs des différentes nations, devaient être singulièrement recher chés par un poëte dont l'antithèse fut toujours la figure favorite; c'est ainsi que dans Zaïre il oppose aux Sarrasins les chevaliers français, dans Alzire les sauvages aux Espagnols, dans Mahomet les Musulmans aux idolâtres, et dans l'Orphelin de la Chine les Tartares aux Chinois. C'est dans ces oppositions qu'il se plaisait à

des

étaler ce qu'on appelle sa philosophie, c'est-à-dire, observations très-communes sur le caractère, les mœurs, ·les usages de ces peuples; mais il savait traduire en fort beaux vers ce qu'on lit dans tous les voyageurs; aussi est-il un grand coloriste, beaucoup plus qu'un grand philosophe.

On prétend que l'Orphelin de la Chine est vraiment une tragédie chinoise, traduite en français par un père jésuite. Voltaire trouva plaisant de nous montrer cette production singulière d'un pays d'où il vient plus de magots que de tragédies. Cette révolution de la Chine, où les vainqueurs reçurent la loi des vaincus, ce triomphe de la philosophie sur la force, et des lettres sur la barbarie, déroba aux yeux de Voltaire le défaut d'intérêt et tous les vices d'un pareil sujet; il vit dans la comparaison des Tartares et des Chinois assez de tirades pour défrayer une tragédie; mais l'attrait le plus séduisant pour lui, c'était le plaisir de parler d'un peuple dont l'antiquité prétendue donne un soufflet à la Bible, d'un peuple soi-disant plus ancien qu'Adam seulement de quatre mille ans; aussi a-t-il fait dire à Idamé que la

Chine compte

De cent siècles de gloire une suite avérée.

Cette suite de cent siècles n'est pas trop avérée; mais Idamé, en bonne citoyenne, doit le croire pour l'honneur de son pays. Voltaire, qui n'était pas chinois avait l'air de le croire aussi ; il aimait mieux ajouter foi aux fables des mandarins qu'au récit de Moïse. Il me semble que, croyance pour croyance, je préférerais celle de mon pays; je ne vois rien de philosophique à s'engouer des contes que débite sur son origine un peuple ignorant situé à deux mille lieues de nous.

La prédilection de Voltaire pour les Chinois était

« ΠροηγούμενηΣυνέχεια »